Avventura
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Message par Invité Jeu 13 Sep - 19:55

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"Depuis quelques semaines maintenant on parle de phénomènes étranges qui se produiraient dans la forêt vierge. Les témoins rapportent des évènements inexplicables: des feuilles qui "volent" en groupes organisés comme des essaims d'abeilles, des racines et des branches qui se tordraient comme des serpents, on ferait même état de certaines plantes qui pousseraient subitement, aux quatre coins des bois. Quelque soit la raison de ces anormalités, nous déconseillons fortement à tous nos lecteurs de s'aventurer là-bas, un individu suspect aux allures inhumaines aurait été aperçu se déplacant dans la zone. Nous vous tiendrons informés de toute nouveauté disponible, merci de nous suivre".

Extrait de la presse


...


Le temps passait vite. Depuis l'été, dans les bois de l'Avventura, un jeune homme s'était isolé, loin de tout et du monde. Né le 29 Juin de cette année, il avait l'apparence d'un humain de vingt-deux ans et le savoir d'un être millénaire, à quelques détails près. Vegeo Natus, élémentaire de plante. Élémentaire? pas comme les autres, le manque de précision impose une explication: les trois jours sombres, moments guerriers et sanglants qui eurent lieu dans la ville d'Avventura, ne condamnèrent pas que les habitants, mais aussi les bois. Le feu provoqué par Elisabeth avait détruit une bonne partie de la forêt, qui, en quelque sorte, après des mois d'agonie, réagit..d'une bien étrange façon.

Les légendes parlent de peuples qui croyaient en l'existence d'esprits protegeant la Nature, ils n'avaient pas tort. En ce monde, ou plutôt caché dans une facette de ce monde, existe le peuple des esprits, êtres dépendants de la Nature et liés à elle, se chargeant du travail quotidien. Tout dépend de leur essence et ainsi dans les bois, les esprits étaient en quelque sorte des "âmes naturelles" liées aux plantes, s'occupant de les faire pousser, se propager, s'éteindre. Loin des critères humains, un peuple sans avis, sans émotions, un peuple neutre, tout comme la Nature. Ils étaient là, existaient, se chargeaient du monde.

Mais Mère-Nature a des idées bizarres parfois, les choses évoluent, mutent. Ainsi une des âmes en charge de la forêt, après l'incendie, décida de sauver les bois. Cette seule action: celle de décider, changea à tout jamais le destin de l'âme. En mal de puissance à cause des ravages provoqués par les flammes, l'âme naturelle se mit en quête d'une âme humaine pour quémander sa force et prendre forme physique dans le monde des vivants, dans le monde des Hommes. De l'union de ces deux âmes surgit ce qui est encore de nos jours une race mystérieuse, obéissant à des règles différentes que celles suivies par les races actuelles.

Né la nuit du 29 Juin, il cria, de tout son être, il n'était ni esprit naturel ni humain mais avait des souvenirs des deux. Mais pas tous. En existant de la sorte, l'esprit naturel relâcha une partie de lui-même, qui s'occupait de la zone d'où il provenait. Ainsi aucune des deux âmes ne primait et la chose dont la Nature venait d'accoucher était instable..au début.
Après une rencontre haletante avec la destructrice de la forêt, pour laquelle l'être éprouva de la compassion, il fut emmené à l'hôpital dans lequel pendant un court instant il fut formé par une des trois personnes rencontrées en forêt, le médecin Eleonor Doherty. Quand il décida de sortir, la même matinée, il prit une décision: celle de se découvrir, de trouver sa raison d'être, de sauver ses bois et d'apprendre à vivre en tant qu'être vivant car plus jamais il ne serait une des deux choses qu'il était avant. Les semaines passèrent et, isolé dans la forêt, en pleine méditation, en pleine communion avec la Nature, l'élémentaire devint un être stable, les âmes qu'il était avant n'étaient plus que de simples souvenirs lointains, désormais il était un, il était fixe, stable et construit. Lentement ses capacités s'éveillèrent et il put les maîtriser.

Début Septembre, sur un tronc d'arbre coupé par la main de l'Homme, un individu aux allures humaines trône, les jambes croisées, les mains sur les genoux, plongé dans une prière profonde, une méditation intensive. Une chemise blanche posée à terre, avec seulement une paire de jeans il siège, torse nu, les yeux clos, ses cheveux châtains-blonds recouvrant le sommet de son visage et illuminés par le seul trait de lumière qui a pu filtrer à travers les branches de cette zone aux aspects anciens. Encerclé d'abres aussi vieux que ce qu'une partie de lui était avant, il respire paisiblement, il s'est trouvé, il est né une seconde fois. Dans les branches des arbres, les oiseaux chantent, et la paix descend.

Message par Invité Dim 16 Sep - 23:12

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Ce jour là, un jour parmi tant d’autres, Jilan se rendit dans les bois avoisinant le parc, curieux de savoir ce qu’il pourrait y découvrir. Depuis son arrivée dans la ville, il y a de ça quelques années, ces restes noirs et calcinés de ce qui avait du être une splendide forêt, attisait sa curiosité malsaine. Il n’était pas au courant des événements survenus lors des jours sombres mais ce spectacle de désolation l’attirait. Autant qu’il suscitait chez lui un autre sentiment, chose sur laquelle il ne parvenait pas à mettre de nom. Etait-ce parce qu’il ne connaissait que très mal ce ressenti ? Ou parce qu’il ne voulait pas admettre qu’il redoutait cet endroit et ce qu’il en émanait ? Tout comme face à cette femme étrange l’autre fois. Il avait beau désirer le chaos, sa nature de Lightness se manifestait dès lors qu’il entrait en contact avec des éléments issus des ténèbres. Comme un sixième sens, elle le mettait en garde, lui commandait de s’en éloigner mais il n’en tenait pas compte. Quand on est âgé de plus de 300 ans, les émotions sont des choses devenues inutiles et la peur était l’une d’entre elles. Si le jeune homme avait lu les journaux récemment, il aurait été informé de cette apparition que l’on avait aperçu près du lieu du désastre. Cela n’aurait changé en rien ses motivations mais peut-être aurait-il réfléchi à deux fois avant de s’aventurer dans un endroit où il savait d’avance que ses pouvoirs seraient affectés par l’émanation néfaste qui habitait les bois. Mais si le Lightness avait perdu l’habitude de lire les journaux, c’était pour une tragique raison : pour y avoir découvert la triste annonce du suicide de sa petite sœur. Cette nouvelle le hantait toujours, il s’en sentait responsable, et ce, malgré les années qui s’étaient écoulées.

Jilan se rendit donc dans la forêt maudite, arpentant les bois dévastés. Il regretta de ne croiser nulle âme qui vive parmi les restes noircis –la raison en semblait évidente, plus rien ne vivait dans cette partie de la forêt- à qui il aurait pu arracher quelques informations. L’endroit en lui-même n’avait rien d’extraordinaire sans guide pour en raconter la violente histoire. Son ignorance l’agaça autant que le manque d’intérêts que présentait son idée aussi commença t-il à rentrer. Tandis qu’il marchait sur le chemin du retour, il constata avec étonnement que le paysage avait changé à divers endroits. La verdure réapparaissait peu à peu, la Nature reprenant ses droits. Il prit aussitôt cette direction, guidé par la curiosité. Le Lightness n’avait rien contre les forêts sauf quand les feuillages des arbres filtraient la lumière du soleil, chose qui influençait énormément son humeur. Ses pas le menèrent un peu plus profondément dans les bois. Il nota l’aspect ancien des arbres alentours et en déduisit que cette partie avait visiblement été épargnée par le feu. Il subsistait un contraste entre les pousses qu’il avait aperçu plus tôt et ces végétaux sur lequel le temps avait laissé sa marque. Etrangement, la verdure ne repoussait pas partout et de manière aléatoire. C’était étrange. Etait-ce l’œuvre d’une âme charitable ? Le jeune homme sourit. Si c’était le cas, il espérait bien la rencontrer. Il se sentait d’humeur potable, peut-être qu’il ou elle s’en sortirait…

Comme il s’y attendait, il arriva dans une clairière mais y découvrit un spectacle surprenant : celui d’un homme torse nu, assis en tailleur sur le large tronc d’un arbre. Il paraissait visiblement en pleine méditation, les yeux clos, soumis au seul rayon de soleil qui perçait entre les feuilles. Jilan l’observa un moment en silence. L’autre ne semblait pas avoir remarqué sa présence et c’était très bien ainsi. Le Lightness ne savait pas encore ce qu’il allait faire. Il émanait une réelle sensation de calme et de sérénité que cela le troublait légèrement. D’ordinaire, les humains n’affichaient pas une telle expression de bien être. Cela lui permettait de puiser dans leurs faiblesses et défauts afin de se jouer d’eux. Mais il n’avait encore jamais rencontré d’être aussi… pur ? Cette réflexion lui arracha une grimace de dépit. Il n’aimait pas employer ce mot et encore moins pour qualifier un vulgaire humain. Allait-il lui tordre le cou ? C’était envisageable mais pas avant d’en avoir appris un peu plus. Qui a dit que la curiosité était un vilain défaut ? Reportant son regard sur le sol, il repéra un caillou et s’en empara. Jouant un peu avec, il fit quelques pas vers la silhouette toujours immobile avant de se décider à s’appuyer contre un arbre alentour. Il patienta encore plusieurs minutes, pensant que l’individu mettrait un terme à sa méditation ou remarquerait sa présence. Rien. Il songea bien à lui envoyer le caillou dans la tempe mais se retint juste à temps. S’il se montrait désagréable, il perdrait l’opportunité d’avoir une conversation civilisée avec cet homme. Suivant les réponses que son interlocuteur lui ferait, il pourrait bien changer d’avis mais il avait envie de lui laisser sa chance.

« Excusez-moi… ? » hasarda t-il non sans une légère teinte de moquerie dans la voix.

La situation était risible. S’il l’avait voulu, il aurait pu prendre l’autre par surprise et voici à présent qu’il se montrait aimable ? Le monde à l’envers. Il attendit que l’homme le remarque avant de poursuivre, pas mécontent de l’effet que suscitait sa venue.

« Pardonnez-moi d’interrompre votre méditation mais je suis curieux de savoir ce qui vous motive de vous isoler ainsi dans un endroit aussi reculé ? »

Message par Invité Lun 17 Sep - 14:32

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Plongé dans son monde, l'élémentaire avait le souffle calme, posé. Il visualisait son parcours depuis son retour dans les bois. À peine arrivé il avait tenté de réveiller les capacités qui sommeillaient en lui, celles qui s'étaient manifestées lors de sa rencontre avec les trois vivants, mais rien n'y faisait, il était incapable de faire quoi que ce soit. Lassé d'avoir tenté pendant des heures il s'était posé contre un arbre pour ensuite s'assoupir. Le sommeil léger, il avait ressenti quelque chose autour de lui, comme un lien avait tout ce qui l'entourait, c'est dans ses songes qu'il avait trouvé le chemin.

Les débuts furent compliqués, se trouver était une tâche bien complexe, spécialement quand on avait une âme dont la stabilité ne tenait qu'à un fil. Après sa découverte des capacités bénéfiques du repos de l'âme, il tenta à plusieurs reprises de se rapprocher de cet état qu'il avait trouvé pendant son sommeil, de ressentir à nouveau ce lien profond qui semblait exister entre lui et les bois dont il provenait. C'est à travers ces exercices qu'il parvint à découvrir entièrement ses deux côtés, apprenant chaque jour de nouvelles choses sur lui-même. Il avait exploré son côté humain, ses capacités à ressentir physiquement et émotionnellement, avait décelé des talents de cette partie de lui qui ne demandaient qu'à revenir à la lumière. Puis, plus lentement, il avait examiné son côté naturel, celui qui faisait de lui un élémentaire et plus les semaines passaient, plus des choses semblaient se produire. Il se réveilla un jour avec en lui la carte de toute la forêt en tête et le sentiment de déborder d'énergie, de vie à distribuer, ses capacités étaient en plein éveil et il savait enfin percevoir à nouveau l'essence des choses autour de lui, leur nature.
Plus tard, ses deux âmes ne formant plus qu'une et ses pouvoirs en plein essor, il savait contrôler les plantes, les faire fleurir ou fletrir avant l'heure, encore quelques temps et il retournerait probablement en ville, découvrir les êtres humains et trouver un moyen efficace de sauver ses bois.
Il avait tenté à plusieurs reprises d'insuffler la vie aux plantes de la forêt morte mais les pouvoirs d'Elisabeth, la Darkness responsable de tout, étaient semblait-il encore présents et trop puissants pour pouvoir se faire dépasser par ceux de l'élémentaire, seul. S'il voulait sauver ses bois, il avait besoin de ses congénères, un être seul ne pouvait rien. Sa venue au monde n'avait alors que peu de sens car isolé, il était trop faible pour agir.

Toujours les yeux fermés, il inspirait et expirait calmement, encore un peu et sa méditation se transformerait en simple sieste. Alors qu'il était sur le point de vraiment s'endormir, il perçu quelque chose qui s'approchait de lui, une forme de vie différente de celles perçues avant traversait les bois dans sa direction. Quelques instants plus tard l'individu arriva, discret, et ne se fit pas remarquer. L'élémentaire, curieux, tentait de percevoir la personne qui se tenait non loin de lui. Une drôle de sensation émanait de celle-ci, par bien des aspects.

« Excusez-moi… ? »


Il ouvrit les yeux et ses pupilles vertes se rétractèrent sous l'infime lumière du soleil.

« Pardonnez-moi d’interrompre votre méditation mais je suis curieux de savoir ce qui vous motive de vous isoler ainsi dans un endroit aussi reculé ? »


"..."

Il le fixa sereinement et silencieusement pendant quelques secondes, cherchant à deviner celui qui se tenait en face de lui. Quelque chose en lui était peu commun, il dégageait des choses contradictoires. Scutant le regard de l'autre, il remarqua le premier des détails manifestant la divergence du personnage: ses yeux étaient de deux teintes assez peu communes, du moins c'est ce que ses quelques souvenirs soufflaient à son oreille. La pupille droite était couleur rubis et l'autre dorée. Il pencha la tête sur le côté, curieux. Ce n'était probablement pas un humain, ceux-ci n'avaient pas ce genre d'halo, leurs âmes étaient plus dissipées, celle-ci semblait plus vieille et sûrement pas torturée par les mille et une questions qui tourmentaient les jeunes esprits des Hommes. Il souria à l'inconnu en penchant la tête de l'autre côté, enthousiaste à l'idée d'une nouvelle rencontre.

"Je devais trouver certaines choses. Et quelles sont les motivations qui amènent une personne de votre acabit dans les environs?"

Message par Invité Mar 18 Sep - 12:35

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Son interlocuteur avait pris le temps de le dévisager avant de lui transmettre sa réponse. Il semblait l’étudier avec attention, ce qui prouvait qu’il n’était pas le genre d’individu à se fier au premier venu. Et cela plu au Lightness. Il avait horreur de ces gens naïfs et crédules. Peut-être que cet homme pourrait le divertir en fin de compte. Comme la réponse se faisait attendre, Jilan en profita pour observer l’autre en retour : hormis sa tenue pour le moins estivale –chose étrange d’ailleurs puisque l’on arrivait dans les mois les plus froids de l’année et il n’en paraissait pas dérangé- rien de particulier se dégageait de lui. Un physique banal qui aurait pu être celui de n’importe quel humain. Mais il y avait ce sentiment autour de lui, sentiment qui se retrouvait dans son regard émeraude. Il était en paix avec lui-même, chose d’autant plus rarissime pour un humain mais de l’autre côté, on y lisait la détermination. Cela amusa le Lightness : un être aussi faible ne pouvait prétendre réaliser ses idéaux alors qu’est-ce qui lui donnait cette assurance ? L’envie de lui tordre le cou ressurgit une nouvelle fois mais il l’a fit taire.

« Je devais trouver certaines choses. Et quelles sont les motivations qui amènent une personne de votre acabit dans les environs ? »

A trop vouloir connaitre la raison de sa présence en ces lieux, Jilan en fut déçu. La réponse ne le satisfit qu’à moitié, elle n’apportait pas les explications qu’il attendait, ne faisant qu’attiser ses interrogations. Chercher des réponses ? C’était vague. Il est bien vrai que les humains aimaient se perdre dans des réflexions sur leur vie, du genre, « Quel est le but de mon existence ? ». Rien n’était plus futile aux oreilles du jeune homme. Comparée à la sienne, leurs existences étaient bien trop courtes pour qu’ils gaspillent leur temps à se remettre en question en s’interrogerant sur eux-mêmes. Ils auront tout le loisir d’y repenser une fois dans l’autre monde. Si toutefois, il existait quelque chose après la mort. Son expérience passée le laissait toujours aussi sceptique. La seconde phrase de son interlocuteur le tira de ses pensées. « De cet acabit » ? De quoi parlait-il ? Est-ce que quelque chose, dans son allure ou son comportement, l’aurait-il trahi ? Non, à moins de se balader avec une auréole au-dessus de la tête, il voyait mal comment l’autre aurait pu deviné quoique ce soit sur sa véritable nature. Soit il parlait sans songer aux conséquences de ses mots, soit il n’était pas aussi ignorant que Jilan l’avait cru au départ. L’envie de l’interroger de nouveau lui brûlait les lèvres mais en agissant ainsi, il savait qu’il ne ferait qu’attiser les soupçons de l’homme. Il réfléchit alors à ce qu’il pourrait bien dire pour répondre à sa question. Sans toutefois oublier de tirer toute cette histoire au clair quand l’occasion se présenterait.

« Pour les mêmes raisons que vous j’imagine. »

Malgré les efforts qu’il mettait dans la maitrise de sa voix et la chaleur de son regard, sa réplique sonna un peu froidement, tandis que les yeux hétérochromes demeurèrent fixés sur leur cible. Il redevenait le Chasseur, involontairement. Conscient qu’il risquait de dévoiler un peu trop rapidement ses intentions premières, il se reprit après un bref moment.

« J’étais venu ici dans l’espoir d’en apprendre plus sur la partie dévastée de la forêt, peut-être pourriez-vous me renseigner ? »

Jouer le rôle du gentil interlocuteur commençait à l’agacer sérieusement. Il se remit à jouer avec le caillou qu’il avait ramassé plus tôt, le faisant glisser habillement entre ses doigts, s’autorisant parfois quelques sauts au creux de sa paume. Pourquoi s’énervait-il aussi vite ? Depuis sa réincarnation, il n’avait jamais été très patient, c’était que trop vrai. Mais il était de bonne humeur aujourd’hui, rien n’expliquait ce changement soudain. Etait-ce à cause de cet homme ? Non. Les rayons du soleil se faisaient rares dans cette partie de la forêt, peut-être en étaient-ils la cause ? Il fallait qu’il se décide : abréger une conversation banale ou céder à ses pulsions. Mais Jilan avait envie d’en savoir un peu plus sur l’individu en face de lui. Et s’il se révélait ne pas être qu’un simple humain ? Le Lightness n’avait pas encore envisagé cette possibilité. De toutes les races qu’il connaissait ou avait rencontré jusqu’à présent, l’homme ne correspondait à aucune d’entres elles, sauf à celle des humains bien entendu. Il ne dégageait ni la soif de sang des lycans, ni ne montrait aucuns signes propres aux hybrides, ces infâmes boules de poil, quant à la perspective qu’il soit un vampire, elle était nulle. Et selon toute logique, ne rien entreprendre tant qu’il n’était pas certain de savoir à qui –ou à quoi- il avait affaire, paraissait plus raisonnable. Restait à savoir combien de temps ce manège allait durer.

Message par Invité Mer 19 Sep - 0:38

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Toujours posé sur le tronc, l'élémentaire remarqua que sa réponse semblait avoir déçu l'étranger, qui semblait s'attendre à autre chose.

« Pour les mêmes raisons que vous j’imagine. » répondit-il à sa question.

Pour les mêmes raisons. Bien qu'étant plus curieux que méfiant, il se demandait si les motifs qui avaient poussé l'étranger à se rendre dans les bois étaient vraiment du même domaine que les siens. Les deux regards plongés l'un dans l'autre, d'intensités différentes, se scrutaient, à la recherche d'informations pour clarifier la nature de la rencontre qui avait lieu en ce moment même. "Qui était quoi?", telle était la question que les deux acteurs en présence semblaient se poser.
L'élémentaire observa cette fois avec plus d'attention le regard de l'inconnu, quelles étaient donc ces émotions qui découlaient de ces pupilles? proposant elles aussi une devinette concernant les sensations contradictoires qui émanaient de son interlocuteur. Il sentait, dans ce qui émanait du nouveau venu, quelque chose de caché, qu'il ne réussissait pas à déceler. Loin d'être agaçante cette particularité, surement dûe au côté complexe de celui qui se tenait devant lui, attisait la curiosité du jeune homme.

« J’étais venu ici dans l’espoir d’en apprendre plus sur la partie dévastée de la forêt, peut-être pourriez-vous me renseigner ? »


La forêt. Pendant un bref instant le regard de Vegeo s'assombrit, alors que les images de sa première nuit en ce monde lui revenaient à l'esprit. La douleur dans chacun des membres de son corps, ses organes se tordant sous l'effort d'une naissance surnaturelle, sa peau qui s'étirait. Et puis le sang, la sueur, la boue, qui chacune se mêlaient, recouvrant le corps de l'élémentaire.
Sa rencontre avec Elisabeth et Natsume, deux êtres qui n'en faisaient qu'un, deux âmes seules qui se tournaient le dos. Elisabeth, rejetée du monde des vivants, trahie par ses semblables, porteuse d'un fardeau imposé par une vie volée, rongée par la haine, ne vivant qu'à travers elle, faisant de son aversion pour la Terre entière une mère, un chemin à suivre, un guide dans chacun de ses actes. En pensant à elle, le coeur de l'élémentaire se serra, il voulait sincèrement l'aider et, bien que celle-ci répondait absente à son envie de la sauver, il ne perdait pas espoir. Elisabeth, responsable de sa venue en ce monde, il lui devait bien ça.
D'un autre côté se trouvait Natsume, sous l'emprise de la Darkness. Il n'avait eu que quelques instants pour faire sa connaissance mais s'était vite rendu compte qu'outre la race, de nombreuses choses séparaient les deux âmes qui cohabitaient dans un seul corps.
Contrairement à son cas, où la situation n'était pas celle de "concubinage" mais d'union, l'état des deux personnes était tortueuse, deux âmes entières et structurée devant vivre dans un corps, chacune revendiquant le contrôle total, les choses ne pouvaient que s'aggraver. Peut-être devaient-ils se soigner et s'accepter mutuellement? que pouvait-il faire?
Et Eleonor, qu'était-elle devenue? elle qui avait fait l'effort de lui expliquer les us et coutumes des Hommes?

Bien qu'à l'aise dans sa position assise, il décida de se lever, pour se dégourdir les jambes. Il ramassa sa chemise blanche qu'il enfila sans la boutonner et se dirigea vers l'inconnu. Dans les bois soufflait à présent une légère brise, d'une fraîcheur plus qu'agréable.

"Oui, je peux vous renseigner." lança-t-il à l'étranger, qui jonglait avec un caillou d'une seule main, il semblait impatient "Par contre j'aimerais me dégourdir les jambes, partant pour une balade?"

Arrivé devant lui, il lui présenta sa main droite, ses yeux encore plongés vers les siens, cherchant la réponse à ses précedentes questions.

"Au fait, je suis Vegeo, enchanté."

Message par Invité Mer 19 Sep - 19:13

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Son petit jeu dura plusieurs longues minutes. Minutes pendant lesquelles, Jilan ne prêta nulle attention à son interlocuteur, contrairement à ce dernier qui cherchait en vain à deviner ce qui se cachait derrière le regard hétérochrome. Du moins, le Lightness en donnait l’impression. Forcé de rompre l’échange visuel pour se concentrer sur les mouvements rapides du caillou, il semblait se désintéresser totalement de l’individu en face de lui. Pourtant, si ces yeux n’étaient pas rivés sur l’homme, ses oreilles, elles, attendaient avidement sa réponse. Pour qu’il se soit aventuré aussi loin dans la forêt, sans doute devait-il connaitre un minimum les lieux. Et si c’était bel et bien le cas, il y avait une chance pour qu’il réside dans la ville depuis suffisamment longtemps pour en connaitre l’histoire. Jilan patienta, en essayant d’imaginer ce que pourrait lui répondre son interlocuteur. Il se mit à espérer secrètement que l’autre pourrait le renseigner sinon il n’y avait aucun intérêt de poursuivre cette conversation. Comme la réponse se faisait attendre, il attrapa le caillou au vol, marquant une pause et reporta son attention sur l’homme. Il rechercha immédiatement le regard de celui-ci et quelque chose le surprit. Une chose nouvelle s’était glissée dans les prunelles émeraudes, leur lueur semblait s’être assombri. Etait-ce le fait d’évoquer la partie dévastée de la forêt qui le mettait dans cet état ? Si oui, alors ça l’intriguait. Pour un peu, il aurait donné cher pour savoir ce que l’individu pensait. Mise à part son immortalité, il ne voyait plus grand-chose à mettre en jeu pour ce petit privilège qu’était la capacité à lire les pensées d’autrui. L’idée le fit sourire intérieurement. Il laissa l’homme à ses réflexions puis haussa un sourcil quand ce dernier se mit debout. Avait-il définitivement demandé quelque chose de mal ?

« Oui, je peux vous renseigner. Par contre j’aimerais me dégourdir les jambes, partant pour une balade ? » demanda le jeune homme.

Il paraissait avoir retrouvé sa bonne humeur et son entrain à faire la conversation. Jilan crut un instant que l’individu était capable de lire les pensées. Lui qui envisageait de quitter cet endroit au plus vite, espérant retrouver un peu de lumière, voilà qu’on le lui proposait presque sur un plateau d’argent ! Cette perspective dérangea un peu le Lightness, si c’était vrai alors l’autre devait tout savoir de ses intentions.

« Au fait, je suis Vegeo, enchanté. »

Non… Il ne pouvait pas être télépathe. Impossible. Personne ne pouvait lui sourire ainsi en se présentant à lui, tout en connaissant sa véritable nature. Il cogitait trop. Cela le perdrait. Fichus feuillages. Il chassa ses réflexions dignes d’un paranoïaque et adressa un grand sourire au dénommé Vegeo. Mentir et simuler, ça il savait faire. Faire semblant d’être quelqu’un d’agréable et de civilisé. Il ne fallait pas qu’il oublie ses objectifs : en savoir plus sur la forêt et sur cet homme étrange. Et si la politesse ne suffisait pas, il lui restait toujours une autre option. Jilan n’était pas certain de pouvoir utiliser efficacement ses pouvoirs dans cette partie précise des bois mais s’ils s’en éloignaient…

« Cela n’est guère étonnant, après être resté des heures ainsi, vous deviez avoir des crampes. Estimez-vous heureux que je sois venu vous interrompre… »

La répartie était un peu piquante mais il s’en moquait. Toujours souriant, il serra la main du jeune homme, non avant de s’être débarrassé du caillou qui le gênait. Cette poignée de main, en apparence insignifiante, fit savoir au Lightness qu’il avait presque vu juste. Vegeo n’était pas qu’un simple humain mais alors qui était-il ? Il élimina d’office ceux de sa race ainsi que leurs opposées, les Darkness. Dans un cas comme dans l’autre, il l’aurait senti. Le fait qu’il n’était pas capable d’apposer une race, et par conséquent, évaluer la puissance de l’homme, le dérangeait. Mais il n’en laissa rien paraitre, se contentant d’ajouter :

« Tout le plaisir est pour moi Vegeo, je m’appelle Jilan. »

Une fois les politesses échangées, le Lightness emboîta le pas à son désormais mystérieux interlocuteur. Il n’avait aucune idée où l’autre le conduisait. Il avait parlé d’une simple « balade », qu’ils quittent la forêt ou au contraire, se rendent vers le lieu du désastre, cela était égal pour Jilan. Il regretta de ne pas avoir conservé le caillou avec lui, ça l’aurait diverti le temps de leur marche. Car pour l’instant, ni l’un ni l’autre ne parlait, chacun semblant s’abîmer dans ses propres réflexions. Il consentit enfin à rompre le silence.

« Vous devez sans doute trouver étrange que je m’intéresse d’aussi près à ce qui fut jadis une partie de la forêt dans laquelle nous nous trouvons. Je ne suis arrivé que récemment dans la ville et je dois bien vous l’avouer, découvrir un tel spectacle m’a rendu curieux. J’espère ne pas vous déranger avec mes interrogations. »

Message par Invité Mer 19 Sep - 22:34

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« Cela n’est guère étonnant, après être resté des heures ainsi, vous deviez avoir des crampes. Estimez-vous heureux que je sois venu vous interrompre… »


Maintenant qu'il le faisait remarquer, il était vrai que ses jambes jouaient les pleureuses et se plaignaient des moments passés sur le tronc, relativement peu confortable. Toujours dans la même position, à raison de quelques minutes à plusieurs demi-heures par jour, ses articulations ne pouvaient que crier à l'infamie. Par chance il avait passé la plupart de ses journées à se promener dans les bois, qu'ils fussent dévastés ou pas, cherchant à comprendre les plantes plus en profondeur. De cette manière il n'avait pas à souffrir des tortures récurrentes imposées par l'inactivité d'un corps trop peu entretenu.

"Il est vrai que le fait de s'asseoir aussi longtemps peut présenter quelques inconvénients parfois. Et d'ailleurs, comme j'étais sur le point de m'assoupir, vous êtes la bénédiction de ma journée. Qui sait dans quel état je me serais réveillé ?"

« Tout le plaisir est pour moi Vegeo, je m’appelle Jilan. »


Et il lui présenta à son tour sa main. Pendant ce bref échange, l'élémentaire eut le loisir de profiter de la proximité pour ressentir encore plus le vitrail de contraires qui émanait de Jilan. Ce qu'il présentait semblait ancien, usé. En lui se mêlaient lumière et obscurité d'une façon si prononcée que Vegeo ne put rien déchiffrer de celui qui se tenait en face de lui, lui serrant la main sans aucune faiblesse apparente.

Et ils prirent la route. Loin d'avoir une destination précise il pensait surtout à conjurer cette sensation désagréable qui s'était installée en lui. Il avait des fourmis dans les jambes et la sensation était tout sauf agréable, il fallait marcher, redonner un peu de vie à tout ça, ensuite et bien..il trouverait quelque chose à faire.
Toutes ces zones visitées pour ses séances d'entraînement, tous ces endroits qu'il avait vu dans la forêt pour se reposer. Il repensa brièvement à la chance qu'il avait eu en visitant pour la première fois les bois dans ce corps qui lui avait été donné. Il avait passé sa première nuit à l'air libre, expérimentant tous les désagréments que la température d'une forêt pouvait proposer, et le lendemain, alors qu'il cherchait un endroit où se poser tranquillement, il était tombé sur une cabane construite dans des arbres peu hauts et où les branches soutenaient une échelle somme toute assez robuste malgré l'état vétuste que la bâtisse présentait. Une fois au sommet, il avait découvert un petit trésor: aux murs étaient accrochées des toiles de peinture faites à la main et l'unique pièce, d'une taille relativement moyenne, possédait quelques meubles eux aussi nés de la main d'un homme habile à la construction: une table, une chaise, une armoire, un lit. Un mobilier simple et sans prétentions.

Alors qu'ils marchaient dans le silence l'élémentaire, repensant aux conseils reçus sur la façon de se comporter avec les humains et les autres races, se demandait si son mutisme de quelques instants auparavant, remplacé par un examen quasi-approfondi, n'avait pas été discourtois. Bien que son accompagnateur n'eut pipé mot concernant ses façons, Vegeo avait à coeur d'apprendre les habitudes des vivants, qui avaient pour manie de ritualiser jusqu'à la façon de saluer une personne selon son niveau social, créant ainsi inégalités sur inégalités.

« Vous devez sans doute trouver étrange que je m’intéresse d’aussi près à ce qui fut jadis une partie de la forêt dans laquelle nous nous trouvons. Je ne suis arrivé que récemment dans la ville et je dois bien vous l’avouer, découvrir un tel spectacle m’a rendu curieux. J’espère ne pas vous déranger avec mes interrogations. »


Il se retourna pour regarder son interlocuteur.

"Non pas vraiment, la curiosité est une chose naturelle, quelque soit l'âge il est toujours agréable d'apprendre de nouvelles choses. Vos interrogations ne me posent pas problème." Il fit une pause, pensant que pour l'occasion, son accompagnateur se sentirait probablement concerné par la remarque puis ajouta "Si vous voulez tout savoir, la cause de l'incendie remonte à l'année dernière, les environs ont fait l'expérience de bien sombres journées. Je ne sais pas exactement ce qu'il s'est passé ailleurs, ce que je peux vous dire en revanche c'est que le feu s'est manifesté suite aux attaques d'une Darkness."

À la seule pensée d'Elisabeth des frissons firent surface, chuchotant à nouveau à l'oreille de l'élémentaire les évènements de cette fameuse nuit où il l'avait rencontrée.

"Depuis plus rien n'a poussé" fit-il avec une teinte de mélancolie dans la voix.

Ils arrivèrent dans une petite clairière où la lumière dominait, des oiseaux volaient d'arbre en arbre, acclamant les nouveaux visiteurs de leurs sifflotements, l'air était frais ici aussi. Il fit à nouveau face à Jilan.

"Voulez-vous savoir autre chose?"

Message par Invité Ven 21 Sep - 19:11

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Sa prise de parole soudaine atteignit ses objectifs : relancer la conversation qui s’était interrompue presque naturellement sitôt qu’ils avaient pris la route. Non pas que le Lightness détesta le silence mais il préférait le savourer seul. Lorsqu’il se trouvait en compagnie de quelqu’un, d’autres projets naissaient généralement dans sa tête, et c’était le cas aujourd’hui. Lui qui, à la base rappelons-le, était venu pour découvrir la raison de l’incendie, il ne faisait que cumuler les interrogations à présent. D’abord les bois et maintenant cet homme. Il ruminait toujours et encore. Jilan ne savait que trop bien ce qu’on pouvait lire sur son visage dès lors qu’il avait ce genre de réflexions et il fut surpris que son interlocuteur se retourna vers lui pour lui répondre. Heureusement que la surprise et la crainte d’être découvert remplacèrent son regard noir et ennuyé. Un bon point pour lui. « Une chose naturelle » ? Soit, le jeune homme avait sans doute raison sur ce point. Le Lightness était bien tenté de lui répondre que malgré tout, la curiosité perdait de son charme au bout de deux ou trois siècles passé à errer parmi les humains mais il se retint. L’heure des révélations arriverait bien assez tôt. Vegeo faisant mine de vouloir poursuivre, il l’écouta faire. Et en fut satisfait. Ou du moins, satisfait que sa première question obtint la réponse qu’elle réclamait. Ainsi cette ville avait connu des tourments… A en juger par l’état de la forêt ainsi qu’une partie de la ville, cela semblait crédible. Etait-ce à cause de cette paix stupide ? Il regretta de ne pas être arrivé plus tôt au sein de l’Avventura.

« Une Darkness... ? » murmura t-il, plus pour lui-même qu’en guise d’interrogation.

Ce simple mot le faisait frémir autant qu’il l’attirait. Il n’avait jamais rencontré un de ses semblables et encore moins l’une de ses créatures redoutées pour leur malveillance. Ainsi, il y en avait ici. Intéressant. Il voulait rencontrer cette entité. Mais il voyait mal comment faire. Le demander à son jeune guide ? Ce n’était pas très malin. Le timbre de la voix du jeune homme changea au fur et à mesure qu’il s’expliquait au sujet du désastre. Jilan perçut comme de la tristesse sur ses derniers mots. Décidément, cet individu semblait très concerné par ce qui était arrivé à la forêt. Cela en devenait presque louche. Mais vu comment le Lightness l’avait « découvert » assis sur ce tronc… S’il appréciait cet endroit, il était normal qu’il s’en sente attristé, non ? La mélancolie, la compassion… Ce n’étaient pas des émotions très fréquemment ressenties par Jilan, il ne savait comment réagir face à ce changement d’humeur. Il savait d’ores et déjà qu’il ne pourrait jouer ce rôle du visiteur bienveillant à l’égard du dénommé Vegeo. Heureusement pour lui, son interlocuteur n’ajouta rien alors même qu’ils atteignaient une nouvelle clairière où cette fois, le soleil reprenait ses droits. L’afflux soudain de lumière revigora le Lightness. Il prit le temps de savourer cette douce chaleur sur son visage et son corps. Il se détendit un peu. Cela ne le rendrait pas définitivement gentil et serviable, juste un peu plus longtemps sociable.

« J’ignorais que les Darkness maitrisaient la magie basée sur le feu. Cela me donne une vague idée de l’étendue de leurs pouvoirs… » reprit-il après avoir laissé son corps –et sa voix au passage- se réchauffer au contact des rayons lumineux.

En vérité, il ne disait pas ceci dans l’attente d’une réponse ou d’un commentaire de la part de Vegeo. Il se mettait simplement à réfléchir à voix haute, peu soucieux de l’effet que susciterait de tels propos sur son jeune guide. Il était clair que l’existence des Darkness et par conséquent, leurs opposés, n’était plus un secret pour personne, ou presque. Les temps avaient bien changé, avant, le simple fait de mettre un nom sur ces entités, vous faisiez passer pour un adepte de la magie noire.

« Enfin… Je suppose que c’est ce qui arrive quand on tente d’instaurer une paix dont personne ne veut… »

Il avait parlé encore plus bas que d’habitude, à se demander si Vegeo avait entendu cette dernière réplique. Mais pour une fois, il avait parlé avec sincérité, chose rare pour le Lightness. Il se remit à songer aux restes noircis. Puisque les bois avaient été réduits en cendre par une Darkness, est-ce que lui, étant son contraire, pourrait parvenir à lui rendre sa forme originelle ? Seule une tentative lui en fournirait la réponse. Mais était-ce vraiment son genre de ce préoccuper d’une telle chose ? Loin de lui, l’envie de venir en aide à autrui, il avait simplement envie de tester ses propres pouvoirs face à ceux qu’il savait être naturellement ses ennemis. A quelques détails d’opinions près.

« Voulez-vous savoir autre chose ? »

Autre chose ? Bien sûr qu’il le voulait ! Restait à trouver la manière la plus appropriée pour formuler ses demandes. Et aussi à faire le tri dans ce qu’il souhaitait apprendre de son interlocuteur.

« Cette Darkness dont vous m’avez parlé, que lui est-il arrivé ? »

Message par Invité Dim 23 Sep - 1:05

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Alors qu'ils étaient sur le chemin qui les mènerait vers la clairière quelques instants plus tard, et qu'il récitait les informations qu'il pensait correctes concernant l'incident survenu lors des trois jours sombres, l'élémentaire se remémorait les détails concernant cette période. Où tout du moins était-t-il plus précis de dire qu'il détaillait chacune des deux versions qui se trouvaient dans sa mémoire, étant donné que lui-même n'existait pas à cette époque.
D'une part se trouvaient les sensations vécues par sa partie naturelle, plus imprégnée de "ressentis", et de l'autre des souvenirs réels provenant de sa partie humaine. Si l'on mêlait les deux on pouvait donc se retrouver avec une vision précise des faits qui s'étaient déroulés avec les yeux d'un être du peuple des vivants et ceux d'un être du peuple des esprits naturels.

Loin de la ville et de la forêt ce jour là, dans l'air flottait une odeur de mort. Les forces rebelles approchaient, dégageant une noirceur qui envahissait chaque chose qui se trouvait dans les alentours. Les fluctuations dans ce qui était le climat spirituel environnant étaient palpables. Dans ce camp qui courait prodiguer la mort aux habitants d'Avventura se trouvaient des forces si puissantes qu'à l'instar d'un faible navire en proie aux tempêtes les plus violentes des océans un esprit commença lui aussi à tanguer. Après maints changements et lorsque les guerriers arrivèrent en ville, la mutation était en route, un esprit évoluait et prenait conscience. Vers la fin des trois jours, alors que la bataille arrivait à son apogée, deux forces anciennes s'étaient lâchées l'une contre l'autre de toutes leurs forces. Face à un être du peuple des Lightness, la Darkness avait liberé tout son potentiel, entraînant dans sa mort la forêt, dont les esprits élémentaires s'étaient retrouvés fortement affaiblis. La suite de l'histoire est connue, après de nombreux mois l'esprit naturel mutant chercha une âme humaine pour pouvoir s'amarrer dans le monde des vivants et il le rencontra.
Dans le monde où vivaient les êtres faits de chair et de sang Calions, l'humain, avait vécu les choses de façons encore moins agréables. À la fin des trois jours, avoisinant le corps d'un jeune homme de vingt-deux ans broyé par les décombres, se trouvait un petit carnet où, ajoutées à de nombreuses autres notes se trouvaient les derniers jours de son propriétaire.

...


Premier jour:
Alors que je couche ces mots sur le papier, les choses en ville et partout ailleurs semblent se gâter. J'étais retourné pour le weekend vers cette cabane que j'avais construite lors de mes premiers jours ici mais j'ai été obligé de quitter la forêt et de tout laisser en plan. J'étais tranquillement installé et soudain j'ai entendu un boucan infernal dehors, le temps de passer la tête par la fenêtre et je voyais une meute de lycans tout ravager en se dirigeant vers la ville. Je ne sais si ce sont les années passées à effectuer de dangereux travaux mais j'ai échappé à ces sacs à puces. Quand je suis arrivé en ville il était déjà trop tard: les lycans n'étaient pas les seuls à aller vers Avventura, c'est le chaos tout entier qui s'y dirigeait. Du sang par litrons, des gens qui couraient dans tous les sens, c'était comme si en même temps que la lune l'enfer était remonté à la surface.
J'ai voulu me diriger vers ce petit logement que je m'étais trouvé mais il avait explosé. C'est la folie qui anime les gens ici. Gribouiller ces quelques mots m'aide à me calmer, ici l'anarchie totale règne, c'est à se demander si

« Une Darkness... ? » une voix semblait venir de derrière lui. Commentant pour elle-même ses explications.

Deuxième jour:
Une journée vient de passer et sincèrement je me demande pour quelle raison je suis encore en vie. Hier soir alors que j'écrivais les mêmes lycans de la forêt m'ont attaqué, ces animaux m'ont pourchassé grâce à mon odeur. J'ai couru de toutes mes forces, monté je ne sais combien de marches et enjambé je ne sais combien de barrières mais ces bêtes ne m'ont pas lâché. Par je ne sais quel miracle je suis tombé sur un groupe de résistants, ils étaient tous armés et ont pu mettre ces sauvages en fuite. Je suis maintenant dans un campement de secours où se trouvent plusieurs blessés. Les cadavres s'entassent et ceux qui sont encore en état s'activent pour défendre les survivants. Je voudrais tellement les aider, mais ils ne veulent pas de l'aide d'un humain sans pouvoirs. Comment pourrais-je leur en vouloir? même armé lourdement je ne fais pas le poids contre ce qui est actuellement dans les rues.
J'ai entendu parlé d'une Lightness qui serait de notre côté. Depuis l'année dernière des gens parlent de cette nouvelle race mais je n'ai jamais eu l'occasion d'en rencontrer. Dans le camp des attaquants se trouverait une Darkness, je suppose que ce sont deux forces contraires. J'espère être encore en vie demain.

« J’ignorais que les Darkness maitrisaient la magie basée sur le feu. Cela me donne une vague idée de l’étendue de leurs pouvoirs… » ils étaient arrivés dans la clairière, le soleil caressait de ses rayons le visage des deux êtres.

Troisième jour:
Aujourd'hui la bataille est à son zénith. De nombreux morts des deux côtés. Le campement a brûlé et je suis seul, je ne sais plus où aller, je suis désemparé, désabusé. Toutes ces explosions, ces morceaux de corps éparpillés dans les rues. Je n'aurais jamais pensé que des gens puissent être capables de telles atrocités. Et je suis là, inutile, les vêtements imbibés du sang de personnes que je ne connais même pas et auxquelles j'ai tenu la main dans leurs derniers instants. Je ne peux rien faire pour les aider. J'étais venu chercher mes parents mais rien, je n'ai pas trouvé une seule information, mes recherches sont aussi vides de sens que mon existence en ce moment. Tous ces cris qui résonnent, comment pourrais-je


« Enfin… Je suppose que c’est ce qui arrive quand on tente d’instaurer une paix dont personne ne veut… »


Alors que Calions écrivait ceux qui étaient ses derniers mots, le combat entre le bien et le mal atteignait l'apothéose. Le jugement dernier arrivait à sa fin. Assis dans une marre de sang, entouré des personnes défuntes qu'il avait voulu accompagner lors de leur passage vers l'autre rive, les flammes dévoraient les bâtiments, léchant chaque étage de leur chaleur surnaturelle. La fumée noir s'élevait au plus haut et le bleu du ciel n'était qu'un souvenir lointain. Alors qu'au loin des cris d'horreur résonnaient, alors que les corps d'humains ne voyant que la mort devant eux s'écrasaient au sol. Il la vit. Dans toute sa terrifiante splendeur. La mort elle-même, la Darkness, dans sa forme la plus destructrice. Elle, l'apocalypse en personne, pendant quelques fractions de secondes, ses yeux dans les siens, dévorant son âme depuis l'immensité de son pouvoir. Une Déesse sur Terre, la divinité de la destruction. Cet infime moment de contemplation fut son dernier. Subjugué par l'être qui se tenait devant lui, il ne vit pas le sommet du bâtiment qui tombait sur lui.
Quelques jours plus tard, a côté du corps broyé, le journal fut trouvé. Quelques mois plus tard, l'âme de Calions rencontrait un esprit de la nature en quête de renaissance, et Vegeo Natus venait au monde.


...


Il secoua sa tête comme pour se réveiller d'un long rêve. Parler, rêver et écouter en même temps les quelques paroles de Jilan..il ne savait comment il s'était retrouvé dans cet état. Ses explications avaient été courtes et pourtant il avait la sensation d'être allé si loin dans le passé, pendant si longtemps.

"Je ne saurais vous dire" répondit-il tout doucement à la dernière phrase de son interlocuteur.

*Les gens ne savent pas vivre simplement, il en faut toujours plus, les vivants ne savent que se battre comme des sauvages, ont-ils un seul espoir de survie si jamais Mère réagit?* pensa-t-il en imaginant les dégâts si la Nature venait un jour à attaquer les races du monde avec la même violence que ces dernières mettaient dans chacunes de leurs actions.

« Voulez-vous savoir autre chose ? »

« Cette Darkness dont vous m’avez parlé, que lui est-il arrivé ? »


Il le regarda dans les yeux, avec dans le corps et dans la tête les derniers instants de Calions ainsi que sa rencontre avec Elisabeth, emprisonnée dans le corps de Natsume, celle qui avait tué l'humain, réduit en cendres ses bois, et à laquelle malgré tout, contre toute explication logique, il voulait venir en aide.

"Elle est morte suite à un affrontement avec une Lightness."

*Hors de question de lui faire courir des risques* se disait-il alors qu'il mentait pour la toute première fois, avec un aplomb des plus surprenants et dans le regard la sincérité de ceux qui disent vrai.

Il repensa aux sensations vécues lors de sa rencontre avec la Darkness, à l'aspect ancien de son âme puis à l'impression ressentie lors de sa rencontre avec Jilan. Similaire et pourtant opposé. Se pourrait-il que?

"Ce sont deux entités bien puissantes." dit-il en souriant "Les Lightness et les Darkness font partie de cette minorité de races qui peuvent changer la face du monde..vous ne pensez pas?"

Message par Invité Lun 24 Sep - 18:55

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« Elle est morte suite à un affrontement avec une Lightness. »

Les mots tombèrent comme une sentence, réduisant à néant les espoirs du jeune homme. Elle était morte ? Comment ça morte ? N’étaient-ils pas sensés être immortels ? Ce fait était certain, il n’avait pas vieilli depuis son retour à la vie mais est-ce que cela le rendait invincible pour autant ? Il n’avait jamais testé cette hypothèse, trop occupé à tourmenter les humains qui peuplaient ses longues journées. Le doute s’installa dans son esprit. La perspective de la mort ne l’avait plus effleuré depuis longtemps mais les paroles de son interlocuteur venaient ranimer cette crainte ancestrale propre à ces mêmes humains que Jilan méprisait. Il sonda le regard de Vegeo, dans l’espoir d’y déceler une faille, n’importe quel indice prouvant qu’il lui mentait –même s’il ne voyait pas de raison à cela- mais non, l’homme était sérieux. Le Lightness se replongea dans ses réflexions. La seule explication qu’il voyait à la défaite de l’entité, fut que le conflit opposant deux opposés aboutissait à la mort de l’un ou l’autre des partis, le plus faible en l’occurrence. Cette Darkness qu’il avait cru puissante en voyant l’état de la forêt… Elle avait finalement été battue par l’une de ses congénères. Malgré ses convictions comme quoi la loi du plus fort prime sur tout le reste, Jilan regrettait presque que cela soit le cas, d’une part parce qu’il aurait souhaité rencontrer cette créature malveillante mais aussi parce que sa disparition impliquait un autre être de lumière. Comment réagir face à quelqu’un issu de la même race ? Avec ses idéaux, il ne pouvait pas espérer s’entendre avec elle. Est-ce que cette Lightness était encore en ville ? Il lui faudrait le découvrir. Il ne pensait pas apprendre autre chose de la part de son guide, aussi serviable soit-il. Il n’avait plus rien à faire ici, si ce n’est profiter des rayons bienfaisants de l’astre solaire. Toujours silencieux, ses pensées allèrent à la Darkness. Etait-elle en paix à présent ? La solitude que l’on ressentait à travers cette vie d’immortel, s’estompait-elle dans la mort ? Oui… C’était envisageable comme solution. Quand on avait que trop vécu, il fallait mettre un terme à tout ceci. La vie n’est en soi qu’une odieuse mascarade. Et la mort ?

« Ce sont deux entités bien puissantes. Les Lightness et les Darkness font partie de cette minorité de races qui peuvent changer la face du monde… Vous ne pensez pas ? »

Vegeo avait repris la parole et cette fois, ses propos exigeaient une réponse. Etonné que l’homme en vienne à lui demander directement son avis –chose qu’il n’avait encore jamais fais auparavant-, Jilan se retourna vers lui, cessant d’apprécier son bain de soleil. La réplique l’amusa. Que pouvait-il bien savoir de ces deux races pour émettre de telles hypothèses ? Soit, elles étaient puissantes, à bien des degrés, mais changer la face du monde… Pensait-il vraiment qu’une créature, sur laquelle le temps n’avait plus d’emprise, puisse encore se soucier du monde qui l’entourait ? Quand on voit toutes les atrocités que les différentes races réunies sont capable de commettre. La bêtise humaine égalait la violence gratuite des lycans. Si quelqu’un le connaissant bien dans sa façon de voir les choses, l’entendait affirmer de tels propos, il ou elle aurait pu attribuer cette vision du monde à son dégoût des humains et de la vie en général. Pourtant, le Lightness se doutait que bon nombre de personnes pensaient pareil que lui –non pas totalement, ses réflexions étaient uniques à ses yeux- mais les horreurs commises ne laissaient personne indifférent très longtemps, contraignant les gens à choisir leur camp. C’est avec une voix où perçait légèrement l’amusement qu’il lâcha ces quelques mots :

« Le guide demande l’opinion du visiteur maintenant… ? »

Il laissa son interlocuteur apprécier, à sa juste valeur, la pique lancée avant de réfléchir à ce qu’il pourrait bien lui répondre. Il n’avait pas l’intention de se dévoiler le premier, question de principe. Jilan n’aimait pas que les gens sachent qui il était en réalité, bien qu’il reconnaisse lui-même que s’il décidait de prolonger son séjour au sein de l’Avventura, certains commenceraient à se poser des questions. Une caractéristique physique particulière pouvait être dissimulée ou justifiée à l’aide la science. Mais son savoir s’arrêtait là, elle n’était pas en mesure d’expliquer qu’un individu ne puisse vieillir. Pourquoi pensez-vous que les vampires soient craints ? Leur goût pour le sang ne fait pas tout. Le Lightness décida finalement de dire ce qu’il pensait, ou du moins, une partie seulement.

« Vous me demandez ce que j’en pense… ? En quoi des créatures dites immortelles peuvent encore se soucier du monde ? Si c’était le cas, elles auraient déjà changé la face de ce même monde, puissantes comme elles sont. » déclara t-il en perdant peu à peu son sourire.
« Qui suis-je selon vous pour juger leurs capacités et leurs intentions ? »

Est-ce que l'homme en face de lui avait des soupçons sur sa véritable nature ? Si c'était le cas, qu'il le dise toute de suite, Jilan n'aimait pas ceux et celles qui tournaient sans cesse autour du pot sans dire ce qu'ils pensaient vraiment. En vérité, sa dernière phrase, bien qu'en apparence destinée à son interlocuteur, était plutôt une autre de ses réflexions dites à haute voix. Il savait que Vegeo n'était pas en possession de tous les éléments pour le juger -Jilan n'admettait même pas le fait qu'il le puisse- à moins que le Lightness ne lui fournisse des indices, chose qu'il n'avait pas fait. Il l'espérait en tout cas, s'il s'était trahi à un moment ou à un autre, cela l'aurait dépité. Lui qui faisait toujours attention à ses propos... Il jeta un dernier regard vers le soleil avant de prendre la direction de la lisière de la forêt. Il avait obtenu ce qu'il voulait, c'était l'essentiel. Il se rappela soudain l'unique interrogation qui n'avait pas trouvé de réponse au cours de leur échange et s'arrêta juste devant Vegeo, plongeant ses yeux dans les siens.

« La question serait plutôt : qui êtes-vous pour affirmer de telles choses ? »


Message par Invité Mar 2 Oct - 23:31

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« Elle est morte suite à un affrontement avec une Lightness. »

Le silence tomba entre les deux jeunes hommes. On entendait encore plus distinctement les dizaines de petits bruits qui naissaient aux quatre coins de la clairière, animant comme ils le pouvaient la forêt siencieuse. Sur les arbres les feuilles désormais brunes se détachaient des branches, entamant une lente et agonisante course vers le sol terreux. Entraînées par la gravité du globe elles virevoltaient, se balançant de droite à gauche, comme pour murmurer à l'oreille de ceux qui regardaient que la saison de la vie entamait sa partie de cache-cache, laissant le soin aux journées plus froides et aux longs manteaux l'opportunité de sortir de leurs cachettes.
De branche en branche les petits animaux sautaient, voulant jouer les acrobates en passant au dessus des têtes de ceux qui étaient pour eux des géants. Alors qu'un écureuil en poursuivait un autre, il trébucha et s'écrasa sur la tête de Vegeo, qui avait observé avec un certain étonnement la lourdeur qui s'était soudainement imposée dans la conversation. Le petit animal s'agitait dans les cheveux du jeune homme, ébouriffant le tout en de multiples mèches avant de détaler, craignant la punition qu'il n'aurait de toute façon probablement pas reçue. Il tenta de tout remettre en place.
Dans l'esprit de l'interlocuteur de l'élémentaire, les pensées semblaient s'être tournées vers d'autres horizons, beaucoup moins éclairés que l'étaient actuellement les environs. Il repensa à ses ruminations de quelques instants plus tôt. Était-ce sa phrase qui avait d'une manière ou d'une autre provoqué ce retournement de situation?

« Ce sont deux entités bien puissantes. Les Lightness et les Darkness font partie de cette minorité de races qui peuvent changer la face du monde… Vous ne pensez pas ? »

Une puissance dévastatrice, changer la face du monde, réécrire le cours du destin. Ces êtres, même seuls, avaient d'énormes capacités contre lesquelles beaucoup semblaient ne pas pouvoir rivaliser. Ils pouvaient décider de l'orientation que prendrait l'histoire avec plus d'aplomb et de possibilités que les grands meneurs des autres temps. Ensemble, Lightness et Darkness pouvaient conduire les humains vers la lumière ou bien l'obscurité, choisir la prochaine étape de l'évolution, ils pouvaient contrarier la Nature.
Il repensa à sa Mère, la Nature. Et les élémentaires alors? bien que seuls et sous leur forme humaine ils étaient faibles, sous leur forme naturelle ils pouvaient eux aussi disposer d'une puissance hors du commun. Après tout ils étaient nés des entrailles de la Mère créatrice de tout ce qui avait été, de tout ce qui était, de tout ce qui sera, quel était donc leur potentiel?

« Le guide demande l’opinion du visiteur maintenant… ? »


À l'amusement qui se ressentait dans la remarque l'élémentaire répondit par un sourire courtois, replaçant une fois de plus une des mèches qui ne voulait pas retourner à sa place depuis la visite de l'écureuil. Jilan allait ajouter quelque chose et, pendant ces petites secondes de vide Vegeo s'autorisa à penser que celui qui l'accompagnait donnait l'impression d'être aussi discret qu'il l'avait été jusqu'à présent.

« Vous me demandez ce que j’en pense… ? En quoi des créatures dites immortelles peuvent encore se soucier du monde ? Si c’était le cas, elles auraient déjà changé la face de ce même monde, puissantes comme elles sont. Qui suis-je selon vous pour juger leurs capacités et leurs intentions ? »


Il baissa les yeux, désarçonné par la réponse de celui qui se trouvait en face de lui. Il n'avait définitivement pas pensé à cette variable: la lassitude, l'ennui provoqué par les siècles qui s'écoulaient. Même curieux, les humains et probablement n'importe quel autre vivant ne pouvait maintenir éveillée sa soif de savoir aussi longtemps. Tout devait se mourir un jour ou l'autre, et ce qui ne le pouvait pas se voyait retirer la saveur de la vie. Être vivant sans l'être, tel était le lourd fardeau des immortels, tel était le choix de sa Mère. Alors qu'il relevait la tête pour répondre il se retrouva devant le regard examinateur de Jilan.

« La question serait plutôt : qui êtes-vous pour affirmer de telles choses ? »


Gardant ses yeux bien rivés dans ceux de l'étrange personnage qui se tenait devant lui, Vegeo souria, amusé. Lui aussi était donc curieux de savoir avec qui il discutait depuis quelques minutes. Tout en conservant son air enchanté, il recula de quelques pas, se dirigeant un peu plus vers la partie interne de la clairière, puis donna un coup de pied à terre avant de se laisser tomber en arrière.

...


Le sol se souleva légèrement par endroits, créant de petites bosses par-ci par-là, signifiant à ceux dotés d'un regard assez vif que sous terre quelque chose se mouvait de manière douce et lente. Les racines des arbres qui grouillaient sous eux entendirent l'appel de celui qui depuis quelques semaines parvenait à communier avec elles. Bougeant délicatement, avec soin, sans se lier les unes aux autres, elles se dirigèrent vers la surface en direction de l'élémentaire qui lui, chutait tout en regardant Jilan. Elles sortirent du sol pour s'enrouler autour des hanches de Vegeo, le soutenant, pour ensuite former une sorte de grand siège, perché à environ un mètre du sol.

...


Il écarta les bras, donnant sa réponse au questionneur, un air satisfait sur le visage et un large sourire aux lèvres. Il se pencha en avant et le regarda depuis son trône de bois puis fit un geste de la main. De nouvelles racines surgirent du sol pour enrober le curieux et lui créer à lui aussi un siège, aux mêmes caractéristiques. Les deux étaient éloignés de seulement quelques mètres et bien sûr aucune attache ne le retenait si jamais il sentait le désir de partir. Depuis qu'il contrôlait un peu mieux ses pouvoirs, Vegeo pouvait maîtriser les plantes sans les endommager et sans utiliser trop d'énergie, il réduisait ainsi les risques d'être esclave de la Nature, dont l'appel se faisait toujours plus fort quand il utilisait trop ces derniers, le réduisant à un état moins enviable que celui actuel.

"Bien. Je suppose que vous avez une réponse convenable, du moins sur la forme, je pourrais vous préciser le fond plus tard." Il se recula pour mieux s'ancrer dans son siège. "Maintenant c'est à vous, qu'êtes vous donc Jilan?"

Message par Invité Sam 6 Oct - 2:09

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Chose étrange, le jeune homme ne réagit pas à la soudaine proximité entre lui et le Lightness. Etait-il à ce point confiant –ou naïf- pour ne pas le craindre ? Jilan ne parvenait pas à se décider s’il devait ou non se sentir vexé qu’un être qu’il jugeait inférieur à lui, lui rende son propre regard avec autant d’assurance. C’était réellement offensant pour son amour-propre mais d’un autre côté, il comprenait que l’individu ne témoigne aucune méfiance à son égard. Le Lightness ne lui avait procuré aucune raison de se sentir en danger à ses côtés, un détail qui aurait pu coûter la vie à son interlocuteur durant ces quelques minutes d’inattention de sa part. Jilan devait se résigner. L’abondance de lumière dans la clairière dissipait ses pulsions meurtrières. Et malgré le bien-être que les rayons solaires lui procuraient, cet état d’esprit ne lui convenait pas. Lui qui avait tourné le dos à la bonté, aux principes mêmes de ceux de sa race, en arriver là c’était… Pour faire simple, il s’agaçait lui-même, s’énervant tout seul. Situation plutôt ironique à dire vrai, d’autant qu’aucun des sentiments qui l’animaient à ce moment, n’apparaissait sur son visage. Il aurait mieux fait de déverser sa frustration sur l’humain en face de lui, il le savait. Fichu soleil !

Pris dans ses conflits intérieurs, il se contenta d’observer la réaction de son interlocuteur. Ce dernier ne lui répondit pas immédiatement, visiblement décidé à conserver un peu de mystère avant de lui fournir la réponse que le Lightness attendait, si il acceptait seulement de la lui donner. Quand le jeune homme s’éloigna de Jilan pour s’avancer au centre de la clairière, ce dernier s’interrogea sur ses intentions. Soleil ou pas, il obtiendrait ses réponses, même si pour cela il devait utiliser la force. Le jeune professeur voulut dire quelque chose, il ne comprenait pas le manège de l’individu –il avait la désagréable impression que l’on jouait avec ses nerfs- quand le sol remua légèrement sous ses pieds. Au même moment, son interlocuteur perdit l’équilibre pour chuter lentement mais sûrement en direction du sol verdoyant. S’il pensait que le Lightness allait l’aider… Mais quoiqu’il en soit, le comportement de l’homme était vraiment étrange… Soudain, elles apparurent. Des racines éventrèrent le ventre maternel où elles dormaient depuis de longues années pour venir soutenir Vegeo, comme si elles répondaient à un appel silencieux. Interdit, Jilan fixa la lente évolution des racines sans se douter que l’humain-plus-si-humain-que-cela lui réservait une petite surprise. Après s’être assemblées en une sorte de siège champêtre, elles en firent de même, sans doute sur la demande du jeune homme, pour le Lightness, qui se retrouva bientôt lui aussi confortablement installé dans un fauteuil en matériaux véritables.

"Bien. Je suppose que vous avez une réponse convenable, du moins sur la forme, je pourrais vous préciser le fond plus tard." Il se recula pour mieux s'ancrer dans son siège. "Maintenant c'est à vous, qu'êtes vous donc Jilan?"

Le jeune professeur lui jeta un drôle de regard. Il appelait ça une réponse « convenable » ? Hormis avoir invoqué des racines tout en feignant une chute accidentelle, Vegeo ne l’avait pas vraiment renseigné. Jilan n’avait strictement aucune idée de ce qu’était les élémentaires –il n’en avait jamais rencontré auparavant- et si son interlocuteur restait sur cette réponse qui semblait évidente à ses yeux, le Lightness, lui, avait besoin de plus d’explications. Il n’aimait pas le reconnaitre mais cette démonstration l’avait plus embrouillé qu’autre chose. Si l’homme était un humain, il paraissait maitriser la magie. Ou alors… Il était autre chose ? Comment savoir ? Le seul indice dont bénéficiait Jilan était que les émotions, si on pouvait les appeler ainsi, qui se dégageaient de Vegeo, étaient étrangement différents de celles des humains que le Lightness avait croisé. Son interlocuteur semblait en paix avec lui-même, chose d’autant plus improbable pour un vulgaire humain, si facilement en proie aux tourments. Sauf qu’à ce stade, l’homme n’était plus vraiment un simple humain… Malgré le confort que lui offrait le siège, Jilan ne s’y sentait pas à l’aise. Il n’aurait pu l’expliquer, c’était une autre de ces sensations qui échappaient à son contrôle. Il conserva tout de même son sourire, sourire qui s’était quelque peu raidi entre temps.

« Et bien, vous me prenez totalement au dépourvu avec votre « réponse ». Je dois vous avouer qu’elle ne me satisfait qu’à moitié mais avant de vous en demander plus, je suppose que je dois remplir ma part du marché. »

Il avait hésité à dévoiler sa véritable nature à ce Vegeo. Il ne pensait que l’homme en viendrait à lui causer du tort un jour ou l’autre, dans le cas contraire, il lui ferait regretter son erreur fatale. Toutefois, il se plaisait à conserver un peu de mystère autour de lui. Rien n’était plus plaisant que de conserver l’avantage de son identité lors d’une rencontre. Il doutait cependant que son interlocuteur consente à lui en dévoiler davantage si le Lightness ne se prêtait pas au jeu des questions réponses. Restait à trouver comme lui expliquer ce qu’il était. Un Lightness. Oui, c’était le nom commun pour désigner ceux de sa race mais il n’était pas comme eux. Il était… un paradoxe. Et cela, personne ne pouvait le lui enlever. Un être de lumière qui prenait la vie d’autrui ne pouvait être autre chose qu’un paradoxe, une anomalie. Mais qu’on essaya seulement de le considérer comme tel et les choses prendraient une tournure un peu plus morbide. C’est pourquoi Jilan ne pouvait pas se revendiquer Lightness. Il possédait bien leurs pouvoirs et leur immortalité mais pas leur mentalité. La seule façon qu’il voyait pour expliquer ce qu’il était, consistait à utiliser ses pouvoirs. Après tout, l’homme en face de lui en avait fait autant, pourquoi pas lui ? Et si la réponse du jeune professeur ne lui suffisait pas et bien… Le jeu serait relancé.

S’accoudant nonchalamment sur l’un des dossiers rugueux, il éleva la main gauche à la hauteur de son torse, les yeux toujours rivés vers l’étrange humain. En une fraction de secondes, une orbe transparente se forma au-dessus de la paume étendue, lévitant comme par magie à quelques centimètres de cette dernière. Un silence plana sur les deux hommes, l’un attendant une explication, l’autre savourant la lueur d’émerveillement dans les yeux de son interlocuteur. Soudain, il vint une idée dans l’esprit du Lightness. Si cela fonctionnait, cela pourrait être amusant. Il souffla légèrement sur la sphère qui se dirigea vers Vegeo pour finalement arriver à la hauteur du visage de celui-ci.

« Ce que je suis vraiment n’a pas tellement d’importance mais comme vous pouvez le constater je maitrise également ce que l’on regroupe sous le terme de « magie », à la différence que la mienne a besoin d’autres personnes pour révéler tout son potentiel. Voulez-vous essayer ? » conclut-il avec un sourire qui ne présageait rien de bon.

Message par Invité Sam 6 Oct - 22:07

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Fier de lui après autant de temps à s'entraîner pour contrôler ses pouvoirs, l'élémentaire observait les racines qui montaient lentement, portant son interlocuteur, tout en s'attendant à observer une réponse d'une intensité au minimum équivalente à la surprise. Quelle ne fut pas la sienne quand il eut l'impression, en regardant la réaction du jeune homme, que ses capacités n'étaient pas aussi fascinantes qu'il l'avait pensé au début. À deux doigts de faire la moue, Vegeo soupira pour lui-même.

*Moi qui pensais que les gens de ma race étaient rares et surprenants. Ma démonstration ne lui a même pas arraché une émotion.*

Heureux qu'il était de pouvoir dévoiler des pouvoirs qu'il pensait peu communs, il se sentait désormais légèrement irrité de s'être cru si différent que ça de la majorité des habitants de la zone. Si le corps était celui d'un jeune homme d'un peu plus d'une vingtaine d'années, le mental lui restait parfois sembable à celui d'un enfant. Curiosité, envie de s'amuser, de toucher à tout et de tout savoir occupaient l'esprit de l'élémentaire depuis sa venue au monde. Les vivants étaient si intéressants, si étranges dans leur façon de concevoir le monde.

*Enfin je n'ai probablement pas à me plaindre* pensait-il comme pour se réconforter *avec des personnes comme Elisabeth dans les environs ce ne seront sûrement pas trois racines qui sortent du sol qui fourniront du spectacle.*

Cachant sa déception il s'enfonça dans son siège de bois, chassant avec flemme les petits volatiles qui, largement accomodés à la présence de l'être qui était venu élire domicile dans les bois, étaient venus se poser sur les accoudoirs sans trop se soucier de l'avis du créateur et du contexte dans lequel ce dernier se trouvait. Outrés du comportement peu amical de l'élémentaire, les oiseaux s'envolèrent après avoir tenté de lui pincer la main.

« Et bien, vous me prenez totalement au dépourvu avec votre « réponse ». Je dois vous avouer qu’elle ne me satisfait qu’à moitié mais avant de vous en demander plus, je suppose que je dois remplir ma part du marché. »

Il leva les yeux, intrigué. Donc finalement il n'était pas qu'un simple humain. Il haussa les sourcils, son intérêt relancé et sa curiosité d'enfant ravivée. Quelles étaient donc les capacités de Jilan? il ne pouvait logiquement pas être un vampire, il ne dégageait pas réellement les sensations provoquées par les lycans. Était-il un humain avec des pouvoirs? il n'avait pas eu l'occasion d'en rencontrer, qui sait seulement si des êtres de ce genre existaient réellement. Des humains avec des pouvoirs, pourquoi pas, l'idée sonnait bien dans sa tête. Quelques secondes plus tard, une sphère se tenait au dessus de la main de Jilan, allumant dans le regard de l'élémentaire un intérêt qu'il avait du mal à dissimuler. Se relevant un peu sur son siège il tenta de comprendre à quoi pouvait bien servir cette chose.

« Ce que je suis vraiment n’a pas tellement d’importance mais comme vous pouvez le constater je maitrise également ce que l’on regroupe sous le terme de « magie », à la différence que la mienne a besoin d’autres personnes pour révéler tout son potentiel. Voulez-vous essayer ? »

Alors que l'orbe se rapprochait de lui, il regardait curieux le jeune homme qui venait de souffler sur celle-ci pour la pousser dans sa direction, en se demandant si en fin de compte il était prudent de se livrer de cette façon à une personne avec laquelle il n'avait discuté que quelques instants. Eleonor lui avait dit de se méfier de tout le monde, son caractère naïf était-il si dangereux? rien n'indiquait que celui qui se tenait en face de lui représentait une menace. Son regard jonglait à présent entre la petite sphère et Jilan, comme pour deviner si son geste pouvait lui attirer des ennuis. Il la regarda une dernière fois et la curiosité l'emporta, que pouvait lui faire une chose de cette taille? pour quelle raison le jeune homme lui voudrait du mal? ils venaient de se rencontrer et il n'avait rien fait qui aurait pu lui attirer ses foudres.

"Pourquoi pas!" répondit-il enthousiaste.

Et il saisit l'orbe de ses deux mains.

Message par Invité Dim 7 Oct - 23:03

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« Pourquoi pas ! »

Avant que le Lightness ne put ajouter quoique ce soit, l’élémentaire avait saisit l’orbe à deux mains, ignorant totalement le danger que celle-ci représentait pour lui. Ce geste stupéfia un instant Jilan. Eberlué, parce que oui il l’était, il observa, silencieux, celui qui lui faisait face. Comment cet homme pouvait-il se lancer dans la gueule du loup de cette façon ? N’avait-il aucun instinct de survie ? Une sorte de sixième sens qui l’aurait averti du caractère risqué que reflétait la proposition du jeune professeur ? Ou alors avait-il à ce point confiance en son interlocuteur ? Soit, le Lightness ne lui avait donné aucune raison de s’en faire mais n’était-ce pas là un comportement un peu trop inconscient ? Avec une attitude comme la sienne, c’était un miracle qu’il ait survécu jusqu’à présent, surtout après ce que cette ville avait subi. Encore sous la surprise d’une telle réaction, Jilan n’activa pas immédiatement ses pouvoirs. Il se contenta de fixer, incrédule, Vegeo observer la sphère sous tous ces angles. Il semblait s’attendre à ce que ce que quelque chose se produise à la suite du contact de ses mains contre la surface ronde et parut déçu que rien ne survienne. Le Lightness se dit qu’un autre sentiment, complètement différent de la déception qui se lisait sur le visage de son interlocuteur, aurait très bien pu apparaitre à la place de cette dernière sur ce même visage. Mais quelque chose bloquait Jilan. Lui qui s’était toujours méfié des autres car il ne savait que trop bien ce que l’on ressentait quand on se faisait blesser et trahir, il ne comprenait pas. Non, il ne pouvait pas comprendre cette émotion qui était née en lui. Pourquoi diable cet homme lui faisait-il confiance ? A défaut de pouvoir mettre un nom sur ce qu’il éprouvait à ce moment précis, il préféra se réfugier dans quelque chose qu’il connaissait : la colère. S’enfonçant dans le fauteuil en bois, il renversa sa tête en arrière, une main posée sur ses yeux comme s’il semblait lasse. En réalité, il laissait lentement la colère reprendre ses droits. Il ne vivait que par la haine qu’il vouait aux humains. Il ne devait surtout pas se laisser avoir par un pauvre naïf sortir de nulle part ! La pitié n’était bonne que pour les faibles.

« Vraiment… Vous êtes trop naïf… » murmura t-il avant d’ôter la main de son visage pour reporter ses yeux hétérochrome sur le jeune homme en face de lui.

Plus aucune stupeur ne se lisait dans le regard bicolore, remplacée par une drôle de lueur. On y lisait toute la haine et la rancœur qu’il éprouvait à partir de cet instant. Mais était-ce réellement une colère projetée sur son interlocuteur ? N’était-il pas plutôt furieux après lui-même ? Frustré de ne pouvoir comprendre une simple petite émotion ? Il chassa ces sombres pensées. Pour l’heure, il devait se concentrer sur la personne qui se trouvait devant lui s’il voulait utiliser ses pouvoirs. La lumière du soleil aidant, il put contrôler l’orbe parfaitement malgré la distance qui la séparait de lui. Aussitôt dit, aussitôt fait. La petite sphère commença à absorber l’énergie positive qui découlait de l’homme qui la tenait entre ses mains. Jilan ne savait pas vraiment si Vegeo s’en apercevrait immédiatement, ni comment il allait réagir face à ce phénomène. Comprendrait-il seulement que ce vampirisme provenait de lui ? Peut-être… Après tout, le Lightness gardait ses yeux rivés sur son interlocuteur et il l’avait prévenu qu’il maitrisait aussi la magie. Tant pis pour lui, s’il ne s’était pas suffisamment méfié. La loi du plus fort allait-elle une nouvelle fois prôner ? Le jeune professeur savoura les diverses expressions qui agitèrent le visage de l’élémentaire. Il se plaisait à imaginer ce que pouvait bien ressentir une victime de son orbe. Cela devait être désagréable comme sensation et pourtant, vu de l’extérieur, c’était tellement plaisant à observer. Quittant le confortable dossier en bois, il se pencha en avant, les coudes appuyés sur ses genoux et les mains jointes devant son visage, toujours aussi sérieux.

« Qu’y a-t-il ? Vous semblez bien pâle tout d’un coup ? » demanda t-il en souriant.

Si ce n’est le sourire déplacé qu’il affichait, ses propos auraient presque pu sembler sincères. Il savait pertinemment ce qu’il se passait mais il aimait entendre ses victimes le décrire par elles-mêmes. Mais quelque chose clochait. Tout autour d’eux, la végétation s’agitait comme si l’état de Vegeo la concernait. Jilan fronça les sourcils. La forêt ne pouvait pas avoir compris ce qu’il projetait de faire. C’était impossible. Cet homme était-il à ce point proche de la nature environnante ? Non, ce n’était qu’une personne ayant des pouvoirs, rien de plus. Mais alors qu’il se raccrochait à cette explication rationnelle, les racines qui composaient son siège mêmes, furent parcourues de spasmes. Le Lightness leur jeta un coup d’œil avant de reporter son attention sur le jeune homme toujours aux prises avec l’orbe. Se pourrait-il que… ? Il n’eut pas le temps de pousser plus loin cette réflexion qu’une liane se jeta sur lui pour s’enrouler autour de son cou, lui coupant la respiration sur le coup. Passé le choc, il parvint à respirer avec difficultés mais plus le temps s’écoulait, plus l’étau se resserrait, bloquant peu à peu sa respiration pour de bon. La nature réagissait à son attaque envers Vegeo ? Le défendait-elle ? Pourquoi ? Devant la gravité de sa situation, il arracha d’un mouvement de la main, la sphère des mains de l’élémentaire pour l’envoyer voler dans un coin de la clairière, pensant que cette action annulerait la soudaine agressivité de la végétation. Mais c’était peine perdue, la pression sur son cou ne cessait pas.

Message par Invité Lun 8 Oct - 22:49

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Il jouait sereinement avec l'orbe, la tournant dans tous les sens et s'amusant à varier la pression de ses mains sur cette dernière pour voir s'il pouvait en modifier la forme. Il la faisait passer d'une main à l'autre, la soupesant délicatement. Les simples lois de la gravité, qui retenaient pourtant chaque chose en ce monde, ne semblaient pas s'appliquer à la petite sphère sur laquelle il portait désormais toute son attention, souriant. Il tenta de créer un flux de son énergie vers celle-ci, il n'avait jamais intéragi qu'avec les plantes de la forêt, pour leur redonner la vie et ce en quelques occasions seulement, il voulait voir quel serait le résultat s'il tentait la même opération sur un objet inanimé, mais rien ne se produisit, pas même un léger soubresaut. Quelque peu désappointé il continua néanmoins son exploration tactile.

Après quelques instants il releva les yeux vers Jilan. Prostré au fond du fauteuil, une main sur le visage, il donnait à l'élémentaire l'impression d'être fatigué. Si c'était le cas rien n'était surprenant, les balades en forêt avaient cela de magique qu'elles détendaient même les marcheurs expérimentés, imposant souvent à leurs jambes entraînées une pause réparatrice. Il avait eu le loisir de vérifier ces affirmations en se penchant hors de sa cabane lors de certaines nuits d'été. Nombreux étaient ceux qui avaient choisi de relaxer leurs muscles en se posant dans un coin, après quelques heures de marches, dans un endroit où l'air était beaucoup plus pur que dans la ville polluée. Le regard passant du jeune homme à l'orbe était rieur, rencontrer de nouvelles personnes était un plaisir que l'élémentaire savourait avec patience et délice. À l'image de leur culture, les vivants étaient des êtres aux passés complexes et aux pensées variées et insaisissables, quel plaisir était celui d'en apprendre plus sur eux pour une personne avide de savoirs et d'interactions comme Vegeo.

Quand il reporta son attention sur le jeune maître des plantes, le magicien semblait légèrement différent, peut-être était-il vraiment en proie à l'éreintement des balades champêtres. L'élémentaire s'abandonna sur son siège, rejetant sa tête en arrière, imposant aux racines de le pencher légèrement en arrière, à l'image de ces étudiants las qui en cours poussent sur les pieds de leurs chaises, livrant à leurs esprits vagabonds des chevauchées bien éloignées de l'atmosphère lourde et terne des salles de classe. Alors qu'il inspirait et expirait calmement, totalement détendu, il ne put s'empêcher de remarquer à quel point le bleu du ciel était beau aujourd'hui. Il faisait toujours tourner la sphère entre ses deux mains, ces moments de paix passés à profiter du silence des bois étaient de ceux qu'il préférait. La vie pouvait être si belle, le monde si doux, les moments si profonds, les êtres si sages.

Plongé dans des pensées qui relâchaient toute sa bonne humeur, il se sentit dériver vers de plus sombres élucubrations. Elisabeth..si seule...blessée par les humains, comment pouvaient-ils se comporter de la sorte les uns envers les autres? se battre sans cesse, se haïr, exclure la différence. Elle était tellement emplie de rage et de violence, que pouvaient-ils avoir bien fait pour la rendre comme ça?
Le temps d'un instant et son sourire se fit plus ombragé, laissant place à des sourcils qui se fronçaient de frustration. Pourquoi la vie devait-elle être si injuste avec certaines personnes? pourquoi le monde devait-il être si froid et si glacial, pourquoi les êtres qui peuplaient la Terre devaient-ils être si insensibles et mauvais?

"C'est impardonnable" sussura-t-il pour lui même.
*Pourquoi des personnes de ce genre restent-elles impunies, pourquoi les gens différents comme Elisabeth devraient-ils souffrir à cause de leur nature?*

Il se sentit blêmir. Le coeur plus rapide et diffusant plus de sang dans son corps, la respiration moins légère, le corps plus chaud, les mains crispées sur le siège.

« Qu’y a-t-il ? Vous semblez bien pâle tout d’un coup ? »

"Elisabeth..." grinça-t-il entre ses dents.

Elle avait la haine ancrée en elle. La pitié et l'empathie n'étaient pas de son domaine, les émotions étaient inconnues à son âme, elle était si mauvaise, elle était si diabolique. Sans regrets, sans mesurer la portée de ses actes elle avait détruit tout ce pour quoi il existait, elle avait réduit à néant le but de son existence, condamnant sa partie élémentaire à muer pour se lier à un de ces animaux humains. Et maintenant lui existait, un bâtard hybride, son âme en partie celle d'un de ces êtres répugnants qu'étaient les Hommes. Quel dégoût !
Les Hommes, des sauvages, des brutes, des animaux sans cervelle. Des êtres méprisants et méprisables qui étaient sur Terre depuis si peu de temps et qui se croyaient des Dieux vivants, ils mettaient à sac la Nature, sa Mère, détruisant tout sur leur passage sans aucun respect. Les Hommes, ces raclures, ces déchets vivants, ils méritaient d'être exterminés, d'être les victimes du massacre de la Nature, ils méritaient la fin, une des plus atroces qu'il soit, pour leur multiples pêchés. Et Elisabeth, cette démone. C'était sa faute s'il était désormais dans ce monde, s'il était humain. Elisabeth, cet être démoniaque et insensible, elle valait encore moins que ces futiles humains qui l'avaient trahie. Oui elle aussi, elle aussi...

"Elle aussi mérite d'être punie, elle doit mourir...je la tuerai, de mes propres mains. Je mettrai fin à son existence et j'ôterai le coeur de ce corps dans lequel elle se cache comme la lâche qu'elle est..Elisabeth, je vais détruire chaque trace de son existence. Et les Hommes devront périr eux aussi de ma main et de celles de mes frères.."

Alors que son contrôle de lui-même glissait subtilement de sa conscience pour laisser place au chaos dans son âme, alors que la paix ressentie quelques instants plus tôt s'évaporait dans laisser place à l'ardeur d'envies de meurtres jamais éprouvées chez un être qui prônait la paix, ses yeux prirent une teinte de vert bien différente que celle qu'il avait plus tôt. Encore quelques instants et probablement son pacifisme s'effacerait au profit d'une violence barbare et sa forme élémentaire surgirait.

Ses pensées se faisaient de plus en plus intenses, et autour de lui les choses s'agitaient, comme pour répondre à son manque de maîtrise. Pendant que le siège de Jilan prenait vie pour s'attaquer à son porteur et que l'orbe s'arrachait des mains de l'élémentaire pour voler plus loin, le siège même de ce dernier se décomposa pour enserrer les bras et les jambes de ce dernier pour le plaquer par terre. Manque de contrôle ou volonté de sa Mère de le calmer? rien n'était sûr. Le souffle rageur, Vegeo s'agitait, secoué de spasmes de colère, criant comme un damné. Il devait les tuer, tous ! il devait mettre fin à l'existence de tout ce qui pouvait nuir à la Nature. La prise des racines de fit plus dense et lui se cognait la tête au sol.

*NON...NON...pourquoi..?*

"AAARGH !!"

*Pourquoi..dans ma tête !! pourquoi ces pensées ?!*

Plus il bougeait et plus la douloureuse étreinte des lianes le plaquait au sol, lui imposant de regagner son calme. Après quelques secondes, fatigué de crier et la gorge douloureuse, les pensées en bataille, il s'était rendu, cherchant à comprendre.

*Pourquoi..je ne comprends pas..*

Il n'avait pas remarqué ce qui était arrivé à son interlocuteur alors que lui-même se faisait ligoter. Relevant la tête, horrifié, il vit que les lianes s'étaient enroulées autour du coup de Jilan, elles étaient sur le point de l'étouffer.

"NON !!"

Alors qu'il redoublait d'efforts pour se libérer, la prise des racines se fit moins agressive, finissant par le lâcher. Il se releva tant bien que mal et tout en titubant s'élança en direction de Jilan. Non, pas de violence, quel droit avaient les vivants de se procurer eux-même le pouvoir de décider de la vie ou de la mort d'un autre? quel droit avait la violence pour s'imposer comme la première réponse à tout conflit?
S'avançant vers le siège du jeune homme, chacune de ses précédentes pensées trouvait son contraire pour se laisser anéantir par lui. Il prit appui sur les racines et sauta en direction du siège, s'agrippant aux lianes qui se faisaient plus meurtrières.

"Non, ne le tuez pas, vous n'avez pas le droit, il n'a rien fait." disait-il tout en tirant comme un forcené sur les lianes qu'il avait lui-même invoquées et qu'il ne maîtrisait plus désormais.

Après quelques secondes, sentant que son lien avec la végétation se faisait plus stable, il put imposer aux assassines de relâcher leur emprise sur Jilan. D'un coup, chaque plante retourna dans le sol, le jeune magicien était libre et Vegeo lui, tombait sur le dos, fatigué. Le regard porté vers le ciel, il ne put s'empêcher de lâcher pour lui-même, haletant.

"Pfiouu..c'est fou ce que le ciel est bleu aujourd'hui !"

Message par Invité Jeu 11 Oct - 15:12

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Le Lightness avait commis une terrible erreur et il sut qu’il allait en payer le prix. Il aurait dû prendre en compte le fait que Vegeo n’était pas un humain ordinaire après que ce dernier lui eut fourni une preuve de ses pouvoirs. Il aurait dû introduire ce paramètre supplémentaire dans ses calculs avant de mettre ses plans à exécution. L’homme était capable d’insuffler la vie à la végétation environnante afin de la contrôler et si la première démonstration de l’élémentaire s’était révélée totalement inoffensive pour Jilan, ce n’était plus le cas à présent. Les plantes réagissaient aux ordres de son interlocuteur et à défaut de paroles, c’était par la pensée qu’il transmettait ses directives. Or, si un simple humain n’offrait aucune résistance face à au vampirisme de l’orbe, se contentant de mourir peu à peu, la sphère avait commencé son travail en absorbant les émotions positives du jeune homme, ce qui le rendait désormais instable et violent. Tout le contraire de ce qu’il dégageait quelques minutes auparavant. Le contraste entre les deux personnalités, pourtant à l’origine d’un seul et même être, était surprenant. Terrifiant même. Etait-ce ce brusque changement de mentalité qui poussait Vegeo à s’en prendre à son interlocuteur ? Le Lightness ne comprenait pas. Il n’était même pas certain que l’homme en face de lui avait deviné ses intentions et comprenait qu’on tentait de le tuer. C’était absurde. Et pourtant, l’étau végétal autour de son cou l’informait du contraire. Le manque d’oxygène l’empêchait de réfléchir convenablement. Ses rares pensées se tournaient vers la survie. Comment diable allait-il se sortir de ce pétrin ? Il ne pouvait pas compter sur la pitié de l’élémentaire, il n’en restait plus rien maintenant que l’orbe l’avait totalement aspiré, d’autant qu’il marmonnait entre ses dents depuis plusieurs minutes déjà. Les prémices de la folie destructrice ?

Non, sa dernière chance subsistait dans la petite sphère elle-même. Comme il avait interrompu son attaque avant qu’elle n’aboutisse, Jilan n’avait aucune idée de la quantité d’énergie qu’elle avait absorbé entre temps. A défaut de le savoir, il pouvait toujours essayer de la faire exploser une fois introduite dans le cœur des racines, ces mêmes qui lui ôtaient peu à peu la vie. Mais il restait toujours un problème : où était le noyau de ces maudites lianes ? Chacun des deux interlocuteurs avait un siège indépendant donc faire exploser l’un des sièges n’était pas la solution, surtout que le Lightness envisageait mal l’idée de se faire sauter la cervelle en essayant de neutraliser des plantes. A ce stade, il ne pouvait pas prendre le risque d’utiliser l’orbe n’importe comment. Il savait qu’il n’aurait pas d’autres occasions pour en créer une capable d’exploser, à supposer que la première le puisse. Il ne saurait pas avant d’essayer. Tant pis, il testerait sur le siège de Vegeo. Après un rapide coup d’œil dans sa direction, le jeune professeur songea que c’était là, la meilleure chose à faire. Ledit siège s’en était aussi pris à son porteur respectif, enserrant ses bras et jambes pour le plaquer au sol. L’homme ne semblait ne plus rien maitriser du tout. Phénomène étrange puisque le Lightness était persuadé que l’élémentaire contrôlait chacune des actions de la nature. Jilan se promit d’accorder une attention toute particulière à ce retournement de situation lorsqu’il en aurait l’occasion. Une main agrippée aux lianes qui l’étouffaient et l’autre tendue vers l’endroit où gisait la sphère, il se concentra pour la faire revenir vers lui. Quelle stupidité de l’avoir fait voler à l’autre bout de la clairière. Tout comme c’était naïf de sa part de croire que cela suffirait à calmer la forêt. Alors même que la boule lumineuse s’élevait de quelques centimètres au-dessus de l’herbe, de nouvelles racines jaillirent pour la maintenir au sol. Jilan pesta. Qui commandait cette végétation en furie ? L’homme immobilisé devant lui et qui hurlait comme un damné ? Ou la Nature elle-même ? Le Lightness s’était refusé dès le début à croire à une pareille explication, ce n’était pas rationnel mais qui d’autre si ce n’était elle ? Et surtout, pourquoi ?

Il laissa retomber son bras avec lassitude, ne voyant pas comment se soustraire à cet étau mortel. La perspective de la mort l’effleura un instant. Cette chère amie. Peut-être qu’il allait retrouver cette femme mystérieuse ? Ou bien disparaitre dans le néant ? Oui, c’était certainement cette option là qui l’attendait au tournant. A moins qu’il n’existe un enfer pour les gens de son espèce ? Sans cela, la mort paraissait être une solution plus qu’agréable. Quelque part, les hurlements cessèrent soudain. Qu’était-il arrivé à cet homme ? Il ne pouvait pas être mort aussi ? La Nature, à supposer qu’elle existe sous forme de conscience immatérielle, se montrerait bien cruelle si elle avait appliqué ce châtiment. Cruelle ? En quoi cela était-il mal ? La vie n’était pas cruelle sur tous les points ? Peu importait qu’on naisse bon ou mauvais, chacun avait son lot de souffrances. Et même si cet individu était aussi innocent qu’il y paraissait, lui aussi était capable du pire. Le comportement des plantes en était la démonstration. Dommage que le jeune professeur ne pourrait jamais en témoigner… Un cri fit soudain sursauter le Lightness

"NON !!"

« Ah bah non, il n’était pas mort tout compte fait… »


Revenant dans le monde réel, Jilan observa, interdit, l’élémentaire s’avancer en titubant jusqu’à lui. Que faisait-il ce fou ? Comment avait-il réussi à se libérer de la prison de plantes ? Avait-il finalement retrouvé le contrôle de lui-même ? Allez savoir. Juste au moment où le Lightness s’était résigné à l’éventualité d’une mort éminente, voici que l’homme en partie responsable de ce lui arrivait, tentait à présent de le délivrer des lianes qui l’étouffaient. C’était à ne rien y comprendre.

« Non, ne le tuez pas, vous n’avez pas le droit, il n’a rien fait. »

« Ne le tuez pas ? Il n’a rien fait ? »

Ces mots confirmèrent le jugement du jeune professeur. Le dénommé Vegeo n’avait pas la moindre idée de ce à quoi il venait d’échapper. Ou alors il n’avait pas encore fait le lien entre l’orbe, son brutal changement d’attitude et son interlocuteur prisonnier. Peut-être que s’il l’avait réalisé plus tôt, il ne se donnerait pas la peine de tirer comme un forcené sur les lianes qui entravaient le cou du Lightness. Ce dernier esquissa alors un léger sourire. Cela lui aurait peut-être permis de mesurer la pitié de l’homme qui tentait à présent de le sauver. En aurait-il été toujours capable s’il avait été conscient de la vérité toute entière ?

« Im…bécile… » parvint-il à murmurer, se moquant éperdument que l’élémentaire l’entende ou non.

Soudain, contre toute attente, la pression autour de son cou se relâcha pour finalement disparaitre, les plantes retournant à ce qui avaient été leurs places initiales. Et avant même que le Lightness put de nouveau dire quelque chose de manière compréhensible, Vegeo gisait sur le dos, étendu de tout son long, aux pieds du fauteuil végétal. Son comportement semblait être revenu à la normale, il ne marmonnait plus de choses étranges et inaudibles. Sa seule constatation face à ce qui venait de se passer fut la suivante :

« Pfiouu… C’est fou ce que le ciel est bleu aujourd’hui ! »


« Vous ne seriez pas schizophrène vous par hasard ? »

La réplique de Jilan ne se fit pas attendre et tomba, glaciale. Devant une phrase aussi anodine, il ne put se retenir de laisser échapper son agacement et peut-être même son désespoir. L’individu allongé devant lui était intéressant, nul doute possible. Et il venait de prouver au Lightness que son vampirisme pouvait facilement se retourner contre lui, s’il ne faisait pas suffisamment attention aux cobayes qu’il sélectionnait. Jusqu’où l’envie de tuer pouvait aller ? Dans un sens, le jeune professeur avait eu de la chance de tomber sur un homme pacifique comme Vegeo. Que se serait-il passé face à un lycan ? Le résultat promettait d’être tout autre en effet. Sans perdre un instant, il bondit du siège qui s’effaça aussitôt que son porteur s’en fut allé. Jilan marcha en direction de l’orbe que les racines avaient libérée et s’en saisit. Quelle ne fut pas sa surprise en découvrant cette dernière totalement vide et transparente. Il se retourna vers l’élémentaire, abasourdi. Etait-ce le fait que son attaque n’avait pas été menée jusqu’au bout ? Est-ce que cet homme avait rappelé à lui toutes les émotions que la sphère s’était auparavant approprié ?

« Je dois dire que vous cachiez plutôt bien votre jeu mais je suis en droit de penser que vous n’êtes pas qu’un simple « magicien des plantes ». Qui êtes vous exactement ? » demanda t-il brutalement.

Message par Invité Ven 12 Oct - 16:35

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La bise souffla sur son visage alors qu'il gisait, les yeux clos, tentant de reprendre son souffle et de calmer les battements de son coeur qui s'étaient transformés en véritables roulements de tambours depuis qu'il s'était libéré des racines. Il avait le faciès toujours légèrement crispé à cause des douleurs provoquées par les plantes qui, quelques minutes plus tôt, l'avaient fait rebondir sur le sol comme un vulgaire ballon pour ensuite le plaquer avec violence, quelques gouttes de sueur perlaient par-ci par là, le faisant frisonner alors que la fraîcheur qui venait de le survoler continuait sa route vers les profondeur des bois.

Essoufflé, il se souvenait de la dernière fois où ses pouvoirs s'étaient retournés contre lui, d'une manière toutefois moins violente. Quelques mois plus tôt, alors qu'il venait de naître, suite à une utilisation abusive de ses pouvoirs qui avait ironiquement causé des dommages aux bois qu'il voulait protéger, la Nature s'était manifestée en le transformant en statue de bois, alors qu'il luttait sous sa forme élémentaire. Chacun de ses excès de zèle, de ses abus qui détruisaient une chose de son élément, chacun de ses états d'âme pendant qu'il communiait avec les plantes était strictement "surveillé" et "réglementé". Après tout il était un élémentaire, mi-homme mi-élément, il dépendait totalement de celui-ci, et encore plus spécialement d'une zone éloignée de la forêt où il était né, dans la forêt morte, un endroit qui ne devait souffrir aucune attaque, c'était tout du moins ce qu'il pensait: le lien entre lui et ce lopin de terre était plus fort que son attachement à toute autre chose dans les environs.

S'il devait donc encore travailler sur quelque chose c'était probablement sur ce point: le contrôle de lui-même sur tous les aspetcs. Il ne pouvait se permettre de risquer la vie des personnes autour de lui, respectueux qu'il était des lois naturelles. Lois d'ailleurs auxquelles il pensait depuis le jour de sa venue en ce monde, tout particulièrement sur le point du droit des uns sur la vie et la mort des autres. Les vivants provenaient de la Nature, pourquoi ne pas se contenter donc de vivre et d'attendre sans crainte aucune le jour où leur vie cesserait? si un être prenait la vie d'un autre par choix était-ce là en accord avec le jugement de la Mère créatrice ou alors une autre force jouait sous d'autres conditions? la loi du plus fort pouvait-elle être une autre sorte de sélection naturelle, le temps n'était donc pas le seul assassin?

« Vous ne seriez pas schizophrène vous par hasard ? »

Il releva la tête en le regardant surpris, ne sachant trop que répondre. Être schizophrène? Eleonor ne lui avait pas mentionné de tels mots. Un schizophrène était-il un membre d'une autre race d'Avventura dont elle aurait oublié de lui parler? si c'était le cas la curiosité de l'élémentaire ne demandait qu'à les rencontrer, qui sait quelles étaient les capacités de ces êtres là?
Naïvement, suite à la remarque de Jilan, Vegeo se demandait si ses capacités étaient semblables à celles des schizophrènes dont parlait le magicien, peut-être que c'était réellement le cas, sinon son interlocuteur n'aurait pas fait la comparaison. Il chercherait des réponses une fois de retour dans la ville d'Avventura. Il répondit après quelques secondes.

"Non je ne le suis pas. Pour être honnête d'ailleurs je n'ai toujours pas très bien cerné ce que je suis exactement."

Il se releva puis lissa un peu sa chemise, froissée et déchirée à certains endroits puis s'étira légèrement et, d'un geste de la main, fit disparaître le siège pendant que Jilan en sautait, ne laissant pour seuls témoins de son manque de contrôle que des trous dans le sol qui se refermeraient à la nouvelle pluie, quelques branches brisées et lui, qui dirigeait vers l'élémentaire un regard qui ne dégageait pas toute la sympathie du monde. Pouvait-il en être autrement? il venait de se libérer de l'étreinte trop affectueuse de la mort et c'est lui qui en était responsable, aucune explication ne venait à l'esprit de Vegeo, qui avait prononcé cette remarque probablement tout sauf naturelle après un évènement de ce genre. Il repensa brièvement à ses séances d'entraînement, plusieurs fois il avait été bloqué lors de ses exercices et il était habitué à être limité ou à subir les interventions parfois intempestives de sa Mère, il ne savait mesurer les degrès de sérieux des situations vécues. Combien de passants s'étaient enfuis alarmés par des plantes qui poussaient rapidement et de façon parfois spectaculaire. Il tourna la tête, suivant du regard Jilan qui allait ramasser l'orbe qu'il tenait dans ses mains quelques instants plus tôt.

"L'orbe" songea-t-il.

Ces pensées qui s'étaient insinuées petit à petit dans son esprit. Pourquoi donc ce changement soudain de comportement alors qu'il était jusqu'à ce moment dans un état de calme prononcé? les réponses à la question pouvaient-être nombreuses. Peut-être alors qu'il était connecté aux plantes qui entouraient la zone quelque chose s'était produit sans qu'il ne le perçoive? peut-être qu'il était fatigué et s'était simplement laissé emporté par ses émotions?

*Pas comme ça tout de même, pas à ce point..*

S'emporter, oui. Mais une altération si radicale en seulement quelques minutes? impossible, il savait comment se contrôler. Les seules explications plausibles étaient donc deux: soit certaines magies humaines avaient des effets indésirables sur les gens de son espèce, soit celui dont le regard était passé de la petite sphère à lui-même était moins pacifique qu'il ne semblait. La méchanceté gratuite était typique des êtres humains après tout, il le sentait au fond de lui: certains vivants étaient instables, ils détruisaient et se faisaient décideurs de choses qui étaient au-deçà des prérogatives qui étaient les leurs. Mais pouvait-il être pour autant être un de ceux-ci? Vegeo en doutait, il semblait suspicieux mais pas meurtier pour autant.

« Je dois dire que vous cachiez plutôt bien votre jeu mais je suis en droit de penser que vous n’êtes pas qu’un simple « magicien des plantes ». Qui êtes vous exactement ? »

La demande avait été brutale. L'élémentaire ignora le ton tout en répondant calmement.

"Qui je suis? je n'en suis pas encore sûr."

Il prit une graine trouvée par terre, qu'il avait dans sa poche depuis quelques jours et la fit tourner dans sa main droite tout en la regardant ainsi que Jilan. Il insuffla alors son pouvoir en elle et de petites racines se formèrent, entourant son bras tout en remontant sinueusement, des bourgeons prirent forme pour ensuite éclore en quelques alysses, recouvrant l'avant bras de Vegeo de leur couleur blanche.

"Je sais juste que je suis né pour protéger cet endroit, que c'est la raison de mon existence en ces lieux, c'est ma fonction mais.."

Mais il ne pouvait plus vivre que pour remplir uniquement la fonction reçue à sa naissance. Son côté humain l'encourageait certes à suivre son sens du devoir, après tout c'était la raison première de sa naissance, mais aussi à apprendre, à connaître, à explorer. Ses envies d'humains s'étaient multipliées et il ne tenait pas en place s'il pensait qu'il devait rester ici pour toujours. Maintenant que son âme était une, il ne redeviendrait jamais ce qu'il était avant, après avoir atteint le but qui lui avait été confié il n'aurait plus aucune raison d'être en ce monde. S'il s'était isolé pendant quelques temps, c'était aussi pour trouver la réponse à cette question, pour trouver un autre sens à son existence, pour se trouver une autre raison de vivre.

"Mais je dois dire que quelque chose en moi me commande de viser des horizons éloignés de la nature de ma présence dans votre monde"

Alors qu'il parlait, l'opération inverse se produisait et la fleur redevenait graine pour ensuite être remise dans sa poche.

"Disons en somme que je suis le Gardien de cette forêt.."

Message par Invité Mar 16 Oct - 17:36

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Au fur et à mesure qu’il entendait l’homme répondre à ses interrogations, Jilan sentit la colère céder la place à l’agacement. Non seulement l’individu ne se braquait pas devant le changement d’humeur du Lightness –peut-être se sentait-il coupable d’avoir perdu le contrôle sur les plantes ?- mais en plus, il ne lui fournissait aucun élément de réponse concret. C’était comme si Vegeo existait sans que la conscience ne suive derrière. Si le jeune professeur s’était arrêté à ce détail, il aurait pu croire que l’élémentaire venait de naitre d’une manière ou d’une autre mais… Son âge et sa maitrise de ses pouvoirs ne collaient pas avec cette hypothèse. Bien entendu, Jilan lui-même avait mis du temps à comprendre ce qu’il était réellement, les caractéristiques de sa race faisaient parties des choses que l’on n’apprenait pas à l’école. En ce sens, il pouvait comprendre ce que ressentait l’homme qui se tenait devant lui, à supposer que ce dernier ne joue pas la comédie. Là encore, entre ce que le Lightness analysait et allait imaginer, les indices ne correspondaient pas. Si Vegeo avait voulu se jouer de lui, pourquoi lui était-il venu en aide ? Ou alors il était vraiment schizophrène… Jilan allait reprendre la parole pour en apprendre davantage quand l’élémentaire lui offrit une nouvelle démonstration. Cela troubla encore plus celui-ci. Vegeo maitrisait ses pouvoirs, aucun doute là-dessus mais le jeune professeur commençait à s’interroger sur la véritable nature du prétendu magicien des plantes. Oui il croyait en la magie et il admettait que certaines humains développent une affinité avec elle. Mais à ce stade, il doutait que l’individu soit entièrement humain. Il en avait l’apparence mais peut-être était-il issu d’une autre race ? N’avait-on jamais entendu parler de ces hommes et femmes possédant des liens uniques et privilégiés avec la Nature ? Jilan n’avait jamais rencontré de pareils individus et reconnaissait volontiers qu’il remettait en question leur existence. Est-ce que Vegeo était la preuve qu’il attendait ?

Renonçant à interrompre son interlocuteur, le Lightness fit disparaitre l’orbe, jusque là toujours à sa place initiale, au creux de sa paume. L’élémentaire avait eu un drôle de regard en se rappelant soudain la sphère. Peut-être qu’il n’était pas aussi naïf que cela après tout ? Peut-être avait-il quelques soupçons sur l’innocence de Jilan ? Ce dernier ne voyait plus d’intérêts à employer l’orbe. Il avait prêté une attention toute particulière aux propos de Vegeo quand celui-ci avait évoqué sa fonction de protéger la forêt. Un simple humain, même avec le pouvoir de contrôler la végétation, ne se soucierait pas autant des bois. L’idée que l’homme ne fut qu’un humain se dissipait pour laisser la place aux nouvelles suspicions du jeune professeur. Une phrase en particulier lui fit arquer un sourcil. « Ma présence dans votre monde » ? Qui était-il pour parler de la sorte ? Cette ville était connue pour avoir toléré toutes les races en son sein, si cet individu était bien autre chose qu’un humain, n’avait-il pas incorporé ce même monde ? Ou bien vivait-il en dehors de la civilisation ? Cela pouvait expliquer certaines choses, certains mots mais pas tout. Le Lightness le nota précieusement dans un coin de sa tête afin d’en tirer profit un jour ou l’autre. Pour l’heure, le discours de l’élémentaire lui avait donné une bien meilleure idée et pas forcément la plus agréable à entendre pour son interlocuteur.

« Ainsi, votre devoir est de protéger cet endroit… Inutile de vous communiquer ce que j’en pense, la partie dévastée des bois témoigne par elle-même de votre efficacité. »

Il se désignait comme le Gardien de la forêt ? Jilan ne pouvait pas critiquer cette façon de voir les choses qu’il considérait comme de la prétention –lui-même était bien placé dans la liste des personnes les plus arrogantes qui soient- mais remettre à sa place, l’homme en face de lui, ça oui, c’était dans ses moyens. Il allait savourer le spectacle de la cruauté de la vérité, reflété sur le visage de Vegeo. Le Lightness observa ce que serait la réaction de son interlocuteur avant de reprendre sur le même ton.

« Vous possédez les pouvoirs pour protéger ce lieu, pourquoi donc les retenir ? »

Cette question faisait en partie référence à la perte de contrôle. A ce moment précis, Vegeo avait eu l’occasion de le tuer mais il n’avait pas été au bout. La colère et la haine qui l’avaient envahi dès lors que la sphère avait fait son travail, tout ceci avait été remplacé par la bonté et l’humanisme innés chez cet homme. Quoi de plus frustrant pour le Lightness ? Oh bien sûr, il était satisfait d’être toujours en vie mais cela démontrait aussi une faiblesse dans son propre pouvoir, lui qui cherchait à répandre le chaos en se servant des gens. Et cela ne lui plaisait pas du tout ! Jilan devinait que l’élémentaire devait avoir toutes les raisons valables de détester ceux qui avaient réduit sa précieuse forêt en cendres. Il voulait tester la rancune de son interlocuteur. Peut-être qu’il pourrait lui servir ?

« Devant le spectacle que vous m’avez offert, j’ai compris que vous nourrissez une rancune tenace envers ceux et celles qui ont brûlé entièrement ces bois, je me trompe ? Sans savoir si je voulais du bien ou du mal, vous aviez l’occasion de m’arracher des réponses ou tout simplement me tuer. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ? Parce que vous êtes trop faible pour protéger ce à quoi vous tenez. »

Jilan savait que ces paroles ne faisait pas de lui un meurtrier ou un partisan des Rebelles. Il n’avait fait qu’exprimer le fond de sa pensée, aussi désagréable soit-elle pour celui à qui elle était destinée. Mais c’était plutôt une bonne chose pour l’élémentaire. Si le Lightness prenait la peine de lui dire tout ceci, c’est que Vegeo était suffisamment intéressant à ses yeux pour qu’il ne le tue pas. Même si ça n’avait pas été le cas, le jeune professeur préférait ne pas retenter l’expérience immédiatement. La sensation des lianes autour de son cou était encore trop présente dans son esprit. Mais une chose restait sûre : si l’homme refusait de rejoindre les idéaux de Jilan alors il n’y avait aucun intérêt à le laisser en vie. S’il n’était pas un allié, il devenait un ennemi à abattre. La neutralité n’existait pas dans cette guerre.

Message par Invité Jeu 18 Oct - 18:18

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« Ainsi, votre devoir est de protéger cet endroit… Inutile de vous communiquer ce que j’en pense, la partie dévastée des bois témoigne par elle-même de votre efficacité. »

Atteint dans son ego par la remarque cinglante de Jilan, l'élémentaire baissa les yeux. Il n'avait pas lieu d'être blessé par la remarque de son interlocuteur, son incapacité à sauver les arbres pendant cette période était tout à fait explicable, et pourtant. Il projeta son regard loin d'eux, vers les sommets des arbres noircis par les flammes, déchus et impossibles à sauver. Comment aurait-il pu faire quoi que ce soit. Quand le feu, léchant chaque parcelle de végétation et embrasant chaque plante par sa chaleureuse étreinte s'était présenté dans la forêt, son existence n'était qu'une probabilité perdue dans les méandres de l'univers des possibles. À cette époque il n'était qu'un concept abstrait, une idée dans le vague, un impossible et irréel scénario.

"Je..."

« Vous possédez les pouvoirs pour protéger ce lieu, pourquoi donc les retenir ? »

Non, il n'avait pas la capacité d'agir sur les dégâts provoqués par la Darkness, ses pouvoirs étaient anciens et trop puissants pour qu'un élémentaire de plante seul suffise à tout réparer. Et pourtant il avait tenté à de nombreuses reprises, il avait donné de son énergie à tout ce qui pouvait être sauvé, allant jusqu'à insuffler ses pouvoirs dans les organismes végétaux les plus petits de la forêt. Mais jamais rien ne s'était produit. Perdu, il ne savait ni quoi répondre ni quoi ressentir, il ne comprenait pas s'il était d'une manière ou d'une autre en faute. Après tout même si en tant qu'entité il n'existait pas à l'époque, une partie de lui était à cet endroit, en ce moment précis où tout brûlait, elle était seule, isolée de ses semblables depuis le début des trois jours sombres à cause de sa mutation, incapable d’interagir avec eux.

« Devant le spectacle que vous m’avez offert, j’ai compris que vous nourrissez une rancune tenace envers ceux et celles qui ont brûlé entièrement ces bois, je me trompe ? Sans savoir si je voulais du bien ou du mal, vous aviez l’occasion de m’arracher des réponses ou tout simplement me tuer. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ? Parce que vous êtes trop faible pour protéger ce à quoi vous tenez. »

L'élémentaire releva la tête, étonné par le raisonnement de Jilan. De la rancune envers ceux qui étaient à l'origine de cette tragédie? étrangement non, il n'en ressentait même pas. Les choses étaient simples dans son esprit, chaque chose en ce monde avait une raison de se produire, le bien et le mal n'étaient que des inventions de l'Homme pour cacher une des plus grandes peurs qu'il pouvait connaître: celle de l'inconnu. Ne pas savoir était probablement la pire sensation pour un être humain, lui-même l'avait ressentie lors de ses méditations: cette boule au fond de l'estomac, ce doute lancinant qui sur les parois de sa tête faisait glisser une craie au bruit strident et insupportable. Être dans le vague, dans le brouillard complet, ne sachant pas d'où l'ont vient, où l'on est et quelle est la destination. Oui, la peur de ce qui se cache. Combien de mensonges les humains avaient-ils inventés, combien de plis de fausses certitudes s'étaient entassés sur le dos de la vérité, cette seule et unique information à laquelle aucun être conscient ne peut accéder, cette chose que tout un chacun savait mais avait oublié, ce savoir que les esprits naturels possédaient et perdaient en devenant ce que lui était devenu. Quel était donc ce secret?

Non il n'avait aucune rancune envers la responsable, tout a un bon et un mauvais côté, si ces évènements ne s'étaient pas produits, il ne serait pas là en train de parler, il n'aurait jamais pu ressentir le vent caresser sa peau, se laisser envahir par les senteurs de la forêt le matin, sentir ses muscles devenir plus frais quand après une pluie, il s'étirait pour respirer l'air limpide de l'aube et la rosée qui était encore présente. Probablement il n'était pas entièrement humain, où alors il était plus complexe, car loin de maudire celle qui avait rongé chacune des racines de la forêt morte, il se sentait par le plus grand des contrastes de son existence redevable envers elle. Il était incapable, du moins une très grande partie de lui l'était, de souhaiter le mal d'une personne. Ce qui venait de se produire tendait pourtant à prouver que quelque part dans les abysses de son être, quelque chose pouvait être réveillé, la pensée l'inquiétait et il devrait un jour trouver cette force en lui pour la faire muer et l'utiliser pour servir de plus nobles idéaux.

Il fit attention à sa deuxième phrase. Alors pour lui le fait de ne pas avoir souhaité sa mort était une faiblesse. Il le regarda étrangement, comme un enfant regarde une bizarrerie à travers les vitres d'un aquarium. La vie était précieuse voilà tout, en quoi vouloir épargner la vie d'un être était une faiblesse? oui en effet il était faible il l'admettait sans honte, il était tout simplement incapable de tenir tête aux pouvoirs de la Darkness, il n'était pas assez fort pour ça, pas encore. S'il ne pouvait rien faire maintenant peut-être pourrait-il plus tard. Oui il était insignifiant parce qu'il n'était même pas en mesure d'accomplir ce qui était la seule raison de sa présence en ce monde, il ne pouvait pas remplir la seule et unique mission que les deux parties de son âme avaient ancré en lui avant de se dissoudre définitivement dans le néant pour lui laisser l'opportunité d'être lui-même.

À entendre Jilan, la faiblesse était vécue chez les vivants comme quelque chose de lâche et de grave, et pourtant n'y avait-il rien de plus naturel que ça? les humains étaient faibles devant le temps, ne pouvant que subir les affres des années, ils étaient sous la coupole de la Nature et étaient incapable de la contrôler, même s'il aimaient le proclamer haut et fort, et plus encore, révélation surprenante que Vegeo avait apprise en observant les quelques personnes rencontrées lors de sa venue au monde: les humains étaient faibles face à eux-même, à trop lutter contre le destin ils en arrivaient à avoir eux-même donné plus de poids à la loi du plus fort en l'imposant non pas comme une chose inscrite dans le cours des choses mais comme un inévitable et unique chemin à suivre, faisant de celui-ci le plus légitime à parcourir. Tellement de pensées en si peu de secondes, il répondit à Jilan.

"Même si le désastre qui a eu lieu ici me peine énormément, parce que j'aurais aimé être là pour au moins tenter de l'empêcher, je ne suis pas responsable. Pour la simple et bonne raison que je n'existais pas encore."

Il marqua une pause, conscient de l'absurdité même de ses propos puis continua tout aussi calmement qu'il avait commencé.

"Pour mes pouvoirs et bien..ce n'est pas par la violence qu'ils existent. Leur but premier est de donner la vie, pas de l'ôter. Du moins c'est l'application que j'ai décidé de leur donner."

Il resta silencieux quelques secondes, pensant à sa prochaine phrase.

"Pour ce qui est de ma rancune et du fait que vous soyez toujours en vie..je pense que vous ne mesurez pas la frivolité de vos propos. À vous écouter on croirait que le monde n'est basé que sur le meurtre." dit-il calmement "Je conçois et comprends la façon dont les êtres des alentours vivent petit à petit, mais je ne suis pas l'un d'eux."

Finalement il avait trouvé, lors de ses recherches en lui-même, ce qu'il était vraiment.

"Je ne viens pas de ce lieu, je n'ai tout simplement pas à suivre les mêmes règles. La nature même de mon être se trouve bloquée entre un plan d'existence que vous ne pouvez pas envisager et votre monde. Pour moi les vivants n'ont pas à juger de quand une vie doit finir, ce n'est pas votre rôle."

C'est d'un ton calme, posé, et sans prétention aucune qu'il continuait d'expliquer à l'inconnu qui il était vraiment et ce qu'il pensait de son monde.

"Mais..au même titre que vous n'êtes pas comme moi, je ne suis pas comme vous. Aussi si je pense à titre personnel que la vie est sacrée, sans toutefois les accepter je me dois de respecter les choix des habitants de cet endroit."

Il termina son monologue en donnant le plus naturellement du monde raison à Jilan.

"Et finalement, en effet je suis faible et bien incapable de protéger ce à quoi je tiens, mais c'est dans l'ordre des choses. Dans le monde existent des gens faibles et des gens forts, et parfois les rôles s'inversent. Pour le moment je suis privé de puissance, un jour les choses changeront, je suis là pour quelque chose et même si je devais m'éloigner de mon rôle un certain temps un jour, je n'oublierais pas ce qui a été fait pour que je naisse."

Il regarda Jilan puis fit craquer son dos encore douloureux, dans le ciel le soleil était haut et pourtant l'air restait léger, comme pour maintenir un équilibre entre le trop chaud et le trop frais dont les humains aimaient à se plaindre.

Message par Invité Sam 20 Oct - 19:02

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Depuis qu’il avait fait par hasard la rencontre de Vegeo, le jeune professeur n’aurait jamais cru avoir affaire à un tel personnage. A première vue, insouciant et plein de bonne volonté, l’élémentaire ne semblait pas différent de ces humains stupides, quoique parfois destructeurs, qui vivaient dans la ville et le Lightness ne l’avait pas vraiment pris au sérieux. Mais quand on prenait la peine de s’interroger à son sujet, l’individu se révélait plus complexe qu’il n’y paraissait. Sa façon de penser et de voir le monde dans lequel il évoluait, tout ceci ne collait pas avec son profil de jeune adulte. Même Jilan pouvait sentir la différence. L’homme ignorait beaucoup de choses mais sa sagesse n’en était pas affecté. Comment pouvait-il avoir une telle vision du monde alors qu’il semblait en ignorer les bases mêmes ? Lorsque son interlocuteur reprit la parole afin de défendre sa position, Jilan craignait de retrouver les mêmes interrogations qui n’avaient de cesse de s’accumuler depuis qu’une vraie conversation s’était installée entre eux. Non pas que tout ce qui avait été dit avant n’était que paroles sans intérêts mais le Lightness ne supposait pas encore que l’homme lui donnerait matière à réfléchir. Pas de cette façon en tout cas, puisque réfléchir à comment le tuer, ça il en était capable. En réalité, il n’y avait pas beaucoup d’options restantes dans l’esprit du jeune professeur, c’était sa façon de voir les choses, quelque soit la situation dans laquelle il se trouvait. Mais si éliminer son interlocuteur n’était pas un problème pour lui, la violente réaction de la végétation à l’encontre des effets néfastes du pouvoir de l’orbe n’était pas à négliger. Il avait fait un erreur, une de trop selon lui. Il écouta donc Vegeo avec attention, afin d’en apprendre plus sur lui.

Et comme il s’y attendait, la perplexité s’installa de nouveau dans son esprit dès les premiers mots de l’élémentaire. Il disait ne pas exister lors de la catastrophe ? Celle-ci daterait de plus de 20 ans ? Non, les dégâts étaient encore trop récents, la ville aurait pu être reconstruite si les événements passés étaient aussi anciens. Son interlocuteur devait avoir assisté à l’incendie ou alors il ne se trouvait pas sur les lieux au moment des faits. Oui, c’était une possibilité mais l’homme précisait bien le fait qu’il n’existait pas, non qu’il était absent. L’absurdité de la chose poussa Jilan à vouloir prendre la parole, quitte à interrompre Vegeo au passage mais ce dernier ne lui en laissa pas le temps. Ou plutôt, les mots du Lightness ne parvinrent pas à franchir ses lèvres tels qu’il les auraient voulu. L’agacement pouvait se lire dans son regard –l’incompréhension avait disparu- mais il ne voulait pas prendre contenance maintenant. C’était déjà bien assez difficile d’obtenir les réponses à ses questions, si en plus il perdait patience… Il eut une pensée pour ses étudiants. Il leur collerait un devoir surprise dans les jours à venir et cette perspective le détendit. Même si ses propos sonnaient étrangement à ses oreilles, l’élémentaire n’en montra aucun signe et poursuivit son monologue. Et le jeune professeur finit par avoir la réponse à laquelle il tenait certainement le plus. Le choix du camps de son interlocuteur.

Ainsi l’homme avait décidé de se ranger du côté du Cercle ? Vegeo ne prononça pas ouvertement son allégeance à l’ordre adverse mais l’idée qu’il le rejoigne sous peu était facile à deviner. C’était décevant mais pas étonnant pour autant. Bon nombre de faibles préféraient choisir un camp où ils n’auraient pas à prouver leur force afin de garantir leur survie. Mais d’un autre côté, ils signaient, sans le savoir, leur arrêt de mort. C’était ironique comme situation. Ironique et pathétique. Jilan soupira intérieurement. Il allait devoir ouvrir les yeux de ce pauvre jeune homme. Lui faire comprendre que cette paix, cet équilibre n’avait pas lieu d’être. Ce n’était pas la loi primaire qui régissait cette ville mais pas seulement elle. Le monde entier avait toujours été sous la gouverne de la loi du plus fort. Et si les gens ne se battaient pas pour exister alors ils devaient disparaitre. Il sourit quand Vegeo décrivit son opinion concernant les propos que le Lightness avait affirmé plus tôt. L’homme ne se doutait pas à quel point il était proche de la vérité. Oui, le monde n’est basé que sur la violence et rien de plus. Pourquoi chercher la pitié et la compassion ? Ces émotions ne sont que faiblesses et vous empêchent d’avancer. Au fur et à mesure que Vegeo dévoilait son avis, Jilan commença à comprendre la nature de l’être en face de lui. Il se refusait à blesser ou à tuer pour des principes plus que futiles. Puis il aborda un autre sujet, qui poussa le Lightness à revoir son jugement une nouvelle fois. Oui il cernait le profil mental de l’élémentaire mais, même si son ton demeurait calme et dénué de prétention, le jeune professeur n’aimait pas ce qu’il y apprenait. D’où l’homme tirait ce recul vis-à-vis de la vie ? De quoi parlait-il quand il évoquait sonmonde ? Est-ce que cela avait un lien avec sa naissance même ? Ou plutôt sa création ?

Toujours aussi calmement, le Lightness l’écouta mais l’impatience de prendre la parole à son tour commençait à s’emparer de lui. Tout ce que disait Vegeo l’amusait, parce qu’il comprenait bien qu’ils avaient chacun un avis complètement différent sur la question de la vie et de la mort. Malheureusement, ce n’étaient que des belles paroles. Chaque être avait en lui sa part de ténèbres et l’élémentaire ne faisait pas exception à la règle. L’agressivité des plantes à l’encontre de Jilan en était la preuve. Peut-être bien que la Nature était intervenue d’elle-même, le jeune professeur n’avait aucun moyen de le savoir. Même en interrogeant son interlocuteur à ce propos, il doutait d’obtenir la réponse. De ce fait, il se basait sur la dégradation –voulue- de l’état psychologique de Vegeo pour expliquer un tel retournement de situation. Cela lui suffisait pour appuyer sa prise de position : rancunier ou pas, l’homme possédait lui aussi de sombres choses au fond de son âme. Le Lightness se perdit un instant dans ses propres réflexions, ignorant la suite du discours de l’élémentaire. Il avait retenu les points importants, le reste n’était rien de plus que des arguments bidons. Il fixa son interlocuteur, guettant la fin de son monologue, fin marquée par un petit craquement quand ce dernier étira son dos. Jilan laissa passer un silence pesant avant d’applaudir lentement, avec ironie.

« Très touchant votre monologue cependant ce ne sont que des paroles en l’air et nous le savons tous les deux. »

Par quoi pouvait-il commencer ? Il avait tant de choses à lui répondre qu’il ne savait par quoi débuter. Pour le coup, il regretta presque de n’avoir pas interrompu le jeune homme sur les points importants quand il en avait l’occasion. Cela lui aurait évité d’avoir à résumer son opinion, en espérant ne rien oublié. Car s’il voulait semer le doute dans l’esprit de Vegeo, il ne fallait pas qu’il omette certaines choses.

« Vous admettez volontiers que vous êtes faible et qu’il existe ailleurs des gens plus forts que vous. Reconnaissez alors que ce monde est régit par la loi du plus fort. Vous pouvez toujours essayer d’aller à l’encontre de ce principe mais ce serait nier la réalité. Oui, je crois en cette loi, la même que la Nature nous impose. Où est le mal de penser que le monde est basé sur la violence ? Il l’a toujours été. Si vous voulez un exemple, observez donc les humains, ils exploitent leur courte existence pour dominer et s’autodétruire. »

Comment Vegeo allait-il prendre ses paroles ? Comme un cours d’histoire mêlé à celui expliquant l’origine de l’humanité ? Jilan espérait que non, il se montrait sincère dans ses mots mais ce n’était pas pour qu’on le reconnaisse comme un bon professeur –même si c’était le cas-, il voulait convaincre son interlocuteur. Son expression, jusqu’à sérieuse et déterminée, se radoucit un peu lorsqu’il s’apprêta à poursuivre. Mais ce n’était pas pour rassurer l’élémentaire…

« Vous dites que nous sommes différents ? Au contraire, je crois que nous avons beaucoup de points communs, à la différence que j’accepte ce qui se trouve au fond de mon âme. J’ai vu de quoi vous étiez capable, l’orbe l’a révélé, vous nourrissez des sentiments aussi noirs que la nuit. Peu m’importe vers qui vous les destinez, le fait est qu’ils existent, que vous le vouliez ou non. »

Il marqua une nouvelle pause, fier de lui. Il amenait les faits de manière à ce que son interlocuteur ait dû mal à les nier. S’il le faisait, cela sonnerait pour de la mauvaise foi, non pour un argument valable. Jilan savait que les émotions négatives n’existaient pas réellement chez l’élémentaire, la sphère n’avait fait qu’exacerber leur puissance. Tout cela faisait parti de l’inconscient, il était donc normal que Vegeo ne pense pas posséder de tels sentiments enfouis en lui. Mais loin de s’attarder sur ce détail existenciel, le Lightness allait aborder le dernier point, le plus important à ses yeux.

« Mais je me demande d’où vous vient cette arrogance de croire que vous êtes exempté des règles de ce monde. Les hommes-plantes sont-ils à ce point suffisants pour penser qu’ils n’ont pas à de comptes à rendre ? Quelque soit votre véritable nature, nul n’échappe à cette loi, sachez le. Quant à être en droit de juger une vie… Cela ne s’applique peut-être pas aux vivants comme vous le dites mais aux morts, si. » conclut-il avec un drôle de sourire.

Etait-il troublé d’évoquer pour la première fois, le fait qu’il était mort ? Bien sûr que l’élémentaire ne comprendrait pas cette allusion, comment le pourrait-il ? L’homme en face lui bougeait et parlait parce qu’il était vivant, non en tant que zombie revenu à la vie. Et pourtant, sans la comparaison avec le zombie, c’était ce que le Lightness était : un être ressuscité à cause d’un caprice.

Message par Invité Lun 22 Oct - 15:58

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Les explications de l'élémentaire résonnaient dans la clairière qui était désormais silencieuse, les petits animaux n'étaient plus dans les alentours, les branches ne craquaient plus et le vent ne soufflait pas les feuilles en rythmant l'atmosphère qui s'était installée depuis leur arrivée, autour d'eux le silence régnait donc à présent et seuls des mots restaient, qui se voulaient clairs et concis malgré la complexité de la situation à expliquer. Pendant qu'il énonçait son plaidoyer, l'élémentaire en profitait pour faire le point sur la validité de ses propos en se demandant si sa part humaine le mènerait un jour vers d'autres chemins. Depuis l'été, déjà quelques changements étaient apparus pour diriger ses opinions vers des chemins qu'il n'aurait jamais pensé prendre: le fait que les humains étaient bien plus complexes qu'il ne le pensait et que toute destruction n'était pas nécessairement motivée par la simple sauvagerie, la prise en compte de l'idée que la Nature et les décisions des Hommes étaient peut-être plus liées qu'il n'y paraissait aux premiers abords, que la vie et la mort n'étaient pas seulement deux points qui délimitaient une existence guidée par l'écoulement du temps uniquement.

Mais malgré les nombreuses contradictions trouvées lors de ses réflexions il s'était tout de même, lentement mais sûrement, forgé un avis sur plusieurs points, notamment sur l'existence des vivants et de leurs droits les uns sur les autres. Il ne restait cependant qu'un agent de la Nature et la neutralité de sa partie élémentaire lui imposait de ne pas s'obstiner à vouloir changer les choses et lutter contre le destin en changeant les bases de l'humanité, quoi qu'il en soit il n'était qu'une existence perdue au milieu de plusieurs autres, elles aussi compliquées et ayant leurs propres opinions. Néanmoins en plongeant son regard dans celui de Jilan lors de ses explications, notant encore une fois la divergence des sensations qu'il éprouvait à la vue de la couleur des deux iris, il sentait qu'au plus profond de lui le paradoxe était maître: ainsi si sa partie naturelle lui imposait une neutralité et une objectivité sans failles, sa partie humaine lui hurlait de se rebeller contre l'ordre établi et de tenter de changer les choses. En ressentant ces sentiments là, son assurance en ses propres propos se retrouvait en pleine oscillation et même s'il était calme, sinueusement, le doute s'infiltrait dans chacune de ses pensées.

Liberté ou contrôle? la question demeurait sans réponse et malgré les nombreuses heures passées à réfléchir, la seule chose qui se produisait était l'élargissement d'un brouillard d'incertitudes concernant les vivants, leurs choix, leur morale. Libres, ils étaient dangereux, instables, manifestaient des comportements propices au chaos. Contrôlés il n'était qu'enchaînés et sans aucune possibilité d'expression mais ils pouvaient rester dociles si tout se déroulait pour le mieux. Mêlées à ces remarques rabâchées de nombreuses fois se trouvait aussi un casse-tête assez similaire qu'était celui du libre arbitre et du destin. Qu'on parle de liberté ou de contrôle la demande principale reste la même: "Chaque personne en ce monde est-t-elle là pour un raison particulière?" lui par exemple, avant même d'exister, s'était déjà vu imposer une tâche, pour les autres aussi des choses étaient décidées? et par qui? par quoi? la Nature? la société? les vivants? et d'ailleurs ces vivants, qui étaient pourtant si contraires à Mère Nature dans leur façon d'être, n'étaient-ils pas à leur manière une partie intégrante de cette dernière? n'étaient-ils pas la preuve même qu'au sein d'une seule et même entité, toute aussi puissante qu'elle soit, une contradiction éternelle imposait sa loi en rendant le cheminement de n'importe quelle âme un vrai parcours d'obstacles?

Ces idées ruminées pendant sa propre explication avaient pris fin en même temps que ces dernières. Désormais dans la clairière un silence presque lourd pesait. Dans un autre univers, celui des idées, deux conceptions différentes sur la réalité, l'existence et la destinée s'affrontaient, ne laissant dans le monde réel qu'un trou béant empli de secondes vidées de tout crissement. Puis, rompu par les applaudissements de son interlocuteur, le silence s'effaça, donnant la parole à Jilan qui de son implacable logique allait encore pousser l'élémentaire vers le ravin des remises en question, troublant une partie de son être et le relançant vers de nouvelles opinions à prendre en considération. Même si dérouté, Vegeo ne voyait pas d'inconvénients à remettre en cause certaines de ses conceptions. Tout ne changerait pas dans sa façon de voir le monde à chaque fois que de nouvelles données s'ajoutaient, mais il était immature de prétendre qu'un point de vue valait tous les autres, ainsi alors que son opposant recommençait à parler, l'élémentaire tendait l'oreille pour voir quelles leçons étaient encore à apprendre.

Les arguments premiers furent ceux concernant la loi du plus fort que Vegeo s'obstinait à considérer comme secondaire et à laquelle il ne voulait se soumettre. Les paroles de Jilan se voulaient nettes, "à la logique imparable" pour certains probablement, mais alors que son interlocuteur continuait son explication l'élémentaire se rendait compte qu'en lui, le paradoxe bien caché commençait à remonter à sa conscience. S'il avait écouté son envie d'être objectif il n'aurait fait que préciser à nouveau et avec entêtement qu'il considérait vivre dans un monde dans lequel les règles ne pouvaient s'appliquer à lui, mais sa subjectivité humaine décida de laisser la parole en fauchant au passage, une fois de plus, les certitudes de Vegeo. Oui, ces règles ne s'appliquaient pas à lui dans la mesure où il ne provenait pas de ce plan d'existence, mais si ce même plan et celui des êtres de cet univers ne formaient qu'un? si cette zone dans laquelle la Nature opérait n'était qu'une pièce collée à une autre zone, celle dans laquelle il évoluait actuellement? si ces deux choses ne formaient en fait qu'un seul et même puzzle, contraire et pourtant identique et complet dans chacun de ses embranchements? si c'était le cas alors ses propos n'étaient que le fruit de la vanité et au même titre que les autres il devait se plier à ces règles.

Il enchaîna ensuite sur la nature même de l'âme de l'élémentaire. Celui-ci détourna la tête, affecté par ces remarques qui se voulaient peut-être vraies et donc assez complexes à accepter. La haine, l'amertume, la vengeance, ces émotions là vivaient-elles vraiment au fond de son être? alors qu'il se posait la question, encore une fois ses pensées se tournèrent vers Elisabeth. Elle avait tout détruit dans les bois et provoqué sa naissance, et pourtant, bien qu'il cherchât encore et encore dans les moindres recoins de ses émotions, il ne pouvait s'empêcher de vouloir l'aider et de ne pas la condamner aussi rapidement. Il avait perçu cette solitude chez la démone qui se manifestait dans ce corps humain, et pas seulement chez elle, même Natsume était isolé. Ces deux esprits bloqués dans un corps n'étaient pas comme lui, qui était le résultat d'une fusion complète de deux existences, elles étaient en conflit permanent pour le contrôle du corps, il voulait les aider à s'entendre et à cohabiter. Mais Jilan marquait un point, si quelques instants plus tôt des émotions de ce genre étaient apparues, c'était qu'elles étaient capables de sommeiller au plus profond de lui, ne demandant qu'un moment de faiblesse pour surgir à nouveau. Était-il aveugle ou tout simplement encore trop naïf dans sa façon de concevoir sa vie et son rapport au monde?

Comme pour achever chaque précédente affirmation de Vegeo et ouvrir entièrement la porte au paradoxe qui désormais siégeait tout puissant et dominait toutes les pensées de l'élémentaire, son opposant pointa du doigt l'arrogance dont il faisait preuve, ce qui mit un point final à la conversation en profitant de l'occasion pour projeter l'accusé dans le monde des doutes, qui lui était bien plus réel que la scission dont il faisait l'hypothèse entre un monde pour la Nature et un monde pour les vivants.

*Et si..et si les vivants étaient partie intégrante de la Nature? alors quel est donc mon rôle ici, moi qui suis mi-naturel mi-humain?*

À nouveau, le silence souffla sur l'herbe et la lourdeur auparavant annonciatrice d'une simple prise de parole clamait désormais la victoire de Jilan sur les arguments de Vegeo. Déstabilisé il détourna le regard, non pas blessé dans son orgueil car les défaites faisaient partie de la vie mais incertain concernant le sens de sa propre existence. Les quelques piliers érigés durant ses séances de méditation, pour se retrouver lui-même, étaient en train de s'étioler. Ne sachant pas quoi répondre, l'élémentaire se contenta de se taire. Pour ensuite noter un mot qui tranchait dans les paroles de son interlocuteur.

"Mort vous dites?"

Message par Invité Mar 23 Oct - 17:06

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Les mots du Lightness résonnèrent, implacables, dans l’air trop lourd de cette fin de journée. La légère brise jouant à travers les feuillages des arbres alentours avait disparu. L’atmosphère de la clairière avait changé. Etait-ce à cause de la tension qui s’était installée entre les deux protagonistes lors de ce duel verbal ? Peut-être. Au fur et à mesure qu’il énonçait ses arguments, le jeune professeur observa la réaction de son interlocuteur en temps réel. La confiance de ce dernier semblait s’envoler à chaque nouveau mot prononcé par Jilan. Le Lightness s’attendait à ce que Vegeo réagisse à ces propos, qu’il s’insurge devant la définition de la vie décrite par l’homme, lui qui avait démontré tant d’assurance dans sa plaidoirie d’avant. Cependant, l’élémentaire accusait chacun des coups de son adversaire, incapable de répliquer, il paraissait se replier sur lui-même –ou en lui-même-, cherchant vainement un moyen de contredire le jeune professeur. Plus que jamais, il donnait l’impression de n’être qu’un enfant que l’on venait de réprimander. Jilan n’espérait pas trop de la part de l’homme en face de lui, il était habitué de part son métier à imposer sa vision des choses, mais il fut un peu déçu de voir que ses mots avaient fait mouche du premier coup. Il n’aurait pas été contre un peu de résistance, surtout après la fermeté avec laquelle Vegeo s’était adressé à lui concernant son opinion sur la vie et la mort. Finalement, l’attitude qu’il adoptait désormais témoignait d’elle-même : le jeune homme cherchait à se convaincre lui-même mais face à une vision différente de la sienne, il ne parvenait plus à se situer. Etait-il vraiment un nouveau né dans ce monde… ? Le Lightness ne savait pas quoi en penser. Ne connaissant rien de ceux que l’on appelait élémentaires, il ne pouvait pas estimer la profondeur de l’être qui se trouvait face à lui. Il se promit de se renseigner au sujet des membres de cette race quand il en aurait l’occasion. Un peu de culture ne lui ferait pas de mal.

Plusieurs minutes s’écoulèrent après que Jilan eut fini son monologue. Le silence se faisait pesant entre eux mais le Lightness ne faisait pas mine de poursuivre. Il avait compris qu’il tenait une brèche dans l’état psychologique de son interlocuteur et il ne le lâcherait pas tant qu’il n’aurait pas atteint son but. Dans le cas contraire, il aviserait. Il pouvait certainement se permettre d’accorder un répit à Vegeo car il savait que leur prochaine rencontre serait déterminante cette fois-ci. L’élémentaire parut soudain intrigué par quelque chose dans les paroles du jeune professeur et il lui fit savoir. Le fait que le Lightness eut évoqué sa propre mort l’interpellait ? Ainsi, après tout ce que Jilan lui avait raconté, il n’avait retenu que ce détail ? Soit, il avait terminé son discours là-dessus, pas étonnant que qu’il rebondisse sur cette information, d’autant plus qu’elle avait de quoi susciter sa curiosité. A juste titre. Il y avait de quoi se poser des questions quand la personne à qui on s’adressait depuis plusieurs heures prétendait être décédée. A moins d’avoir des hallucinations fréquentes ou de posséder des dons de médium, ce genre de situation survenait rarement. Jilan fixa son interlocuteur droit dans les yeux, attendant de voir s’il allait rajouter quelque chose mais comme celui-ci n’en fit rien, il en conclut qu’il allait de nouveau reprendre son rôle de professeur. Il soupira de lassitude avant de reporter son regard sur Vegeo, croisant les bras, avec l’air mécontent de celui qui avait l’impression de parler dans le vent.

« Donc si je comprend bien, de tout ce que je vous ai raconté, vous n’avez retenu que ce mot… ? » demanda t-il pour la forme, conscient de connaitre la réponse.

Maintenant qu’il y repensait, le Lightness n’avait pas clairement précisé qu’il faisait allusion à lui-même en parlant des morts. Il aurait pu éviter la question ou simplement ne pas y répondre. Il n’aimait pas révéler sa vraie nature aux personnes qu’il rencontrait, même si certaines avaient rapidement des soupçons à son égard. Et de toutes évidences, Vegeo était l’une d’entre elles. Peut-être était-il capable de voir plus en Jilan que celui-ci ne le pensait ? Dans ce cas là, mentir ne servirait à rien, autant lui répondre franchement. Le fait de parler de sa mort et de sa réincarnation… Bizarrement, cela ne dérangeait pas le jeune professeur, au contraire, il était curieux de voir quelle serait la réaction de son interlocuteur face à cette nouvelle révélation. Rien de tel pour le perturber encore un peu plus mais cette fois, ce n’était pas la faute du Lightness. Son élève se montrait curieux ? Parfait, il allait satisfaire sa curiosité. Cela promettait d’être amusant. Un sourire mauvais s’installa sur le visage du jeune professeur.

« Effectivement, je suis mort. Le 21 mars 1705 pour être exact. Avez-vous envie de savoir ce qu’il y a après la mort ? » conclut-il sur une petite note de plaisanterie acide.

Peut-être bien que Vegeo ne croirait pas un seul de ces mots ? Peut-être le prendrait-il pour un fou ? Car absolument rien dans son attitude et ses propos, ne prouvait que le Lightness disait la vérité. Ce dernier en avait bien conscience, il n’avait pas le moyen d’assurer la véracité de ses paroles. Si seulement il avait capable de revêtir une apparence céleste, cela aurait suffit pour convaincre les plus réticents. A ce jour, l’unique moyen qu’il envisageait, aurait été de sauver la vie de quelqu’un sur le point de mourir. Mais il connaissait parfaitement le prix à payer pour cela et il n’avait pas envie de gaspillé des siècles d’existence dans le seul but de prouver qu’il était immortel. Son sourire toujours aux lèvres, il contempla le visage de l’élémentaire se décomposer lentement au fur et à mesure que son cerveau prenait conscience de l’ampleur de la révélation de Jilan. Devant l’air incrédule -quoique le mot était faible- de l’homme, le Lightness s’interrogea sur la marche à suivre. Devait-il lui dire qu’il était un de ces êtres de lumière précédemment évoqués ? Après tout, ils avaient bien discuté d’une Darkness éteinte alors pourquoi pas d’un Lightness vivant à présent ?

« Vous vous souvenez lorsque vous avez évoqué ces deux races, Darkness et Lightness… Je suis issu de la seconde catégorie, à mon grand regret. J’en ai connu des générations et je les ai observé depuis tout ce temps. Alors quand vous évoquez votre appartenance à un autre monde, vous me faites doucement rire l’ami. »

Il n’avait pas oublié ce point mentionné lors du discours de Vegeo et Jilan faisait subtilement remarquer à son interlocuteur qu’il n’avait pas été très clair là-dessus. Soit l’élémentaire était vraiment très arrogant pour affirmer des choses pareilles, soit il avait lui aussi quelque chose à cacher au Lightness. Et comme son comportement n'appuyait pas la première des deux hypothèses, Jilan voulait connaitre la vérité à propos de Vegeo. C'était la moindre des choses si l'on voulait recruter. Puisque le jeune professeur venait de lui avouer son secret, il espérait que l'individu en face de lui, en fasse de même.

Message par Invité Mer 24 Oct - 22:55

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"Mort vous dites?"

Le regard sévère, Jilan toisait l'élémentaire qui, silencieux, méditait encore sur les arguments de son interlocuteur, tentant de rassembler tous les éléments en sa possession pour se faire un avis un peu plus objectif. Son argumentation s'était effondrée devant lui comme un château de cartes au vent, ne proposant aucune résistance. Son incapacité à rester stable, à conserver une façon d'entrevoir les choses de manière concrète, équilibrée, lui causerait probablement bien des soucis à l'avenir. Mais si pour les vivants la cohérence était la chose la plus importante, s'ils étaient prêts à sacrifier même leurs convictions pour sembler suivre une logique particulière dans leurs vies quotidiennes, ce n'était pas le cas pour Vegeo. Peut-être était-ce cette prétention dont Jilan faisait mention, mais il considérait que cette manière d'agir - celle de ne pas tenir compte de l'impression qu'il donnait, du moins pas à un point maladif - était tout à fait naturelle, et que si certains pensaient que son manque de stabilité était une faiblesse, ils se trompaient. En effet, qui de plus ignorant qu'un homme qui pense avoir toutes les réponses. Si Jilan avait raison - c'était une hypothèse perdue au milieu de plusieurs autres à considérer - alors ce n'était pas problématique, il pourrait apprendre autre chose, évoluer grâce à la remise en question, car si l'assurance permettait de camper, immobile, sur ses positions, le doute lui se faisait le garant d'une certaine mobilité.

C'était donc avec toute la curiosité du monde - engendrée par son côté humain - et en se promettant à lui-même de reconsidérer ses positions plus tard, que Vegeo attendait les éclaircissements de ce personnage à l'argumentation si précise et détaillée concernant ses propos. À quoi faisait-il référence? en quoi les morts pouvaient-ils agir sur le monde des vivants? dans l'esprit de l'élémentaire les questions se faisaient nombreuses et c'est presque décontenancé qu'il écouta donc la réponse de Jilan.

« Effectivement, je suis mort. Le 21 mars 1705 pour être exact. Avez-vous envie de savoir ce qu’il y a après la mort ? »

La surprenante révélation éclata donc au grand jour et une date fut fournie. Devait-il croire que ces affirmations étaient fondées et véritables ou pas? devait-il douter de la sincérité de Jilan? plus il discutait et plus l'impression se faisait chemin dans sa conscience que cette personne avec laquelle il confrontait ses points de vues était peu commune. Il n'avait strictement rien pour confirmer ses soupçons et c'était là que se trouvait le principal problème. Alors qu'il se faisait plus sérieux, tentant de prendre conscience de l'ampleur de l'information, le visage de Vegeo se faisait plus sombre. Si une existence aussi improbable que la sienne était possible, alors les propos de Jilan pouvaient peut-être obtenir le droit d'être affublés d'un certain crédit. Petit à petit le paradoxe se refaisait maître des lieux et chuchotait à l'oreille de son âme que le jeune homme en face de lui était de cette façon lié à lui, en quelque sorte. En effet, si Jilan revenait des morts, alors d'une certaine façon, et ce de manière diamétralement opposée, ils étaient tous les deux des frères, aux caractéristiques totalement contraires. Ainsi lui devait son existence au royaume des morts et..

*Et si effectivement il y a quelque chose après la mort alors...*

Après la décomposition de son expression, provoquée par la surprise, un léger sourire pointa sur le coin de ses lèvres, imperceptible. Voulait-il savoir ce qu'il y avait après la mort? sa soif d'apprendre le demandait mais alors qu'il pensait à formuler sa phrase Jilan ajouta des informations à sa révélation première. Vegeo haussa les sourcils. Ainsi donc il était de ceux qui étaient les reflets bienveillants des Darkness? mais c'était à son grand regret? l'élémentaire commença à penser que ses idées précédentes étaient peut-être envisageables: il avait bien à faire à un individu peu commun. Si l'heure était aux révélations, peut-être pouvait-il tenter de donner quelques informations lui aussi. Il plongea ses yeux verts dans ceux hétérochromes de Jilan tout en souriant, cernant la modalité primordiale qui faisait de l'écart entre leurs points de vues un gouffre sans fin et peut-être infranchissable.

"Est-ce que je veux savoir ce qu'il y a après la mort?" fit-il, levant son regard au ciel et posant la question à lui-même ainsi qu'à son interlocuteur.

L'air serein à nouveau, il était quelque peu amusé par la situation qui se présentait à lui, la rencontre s'en faisait encore plus intéressante. Peut-être pouvait-elle même devenir instructive pour ces deux frères qui ne l'étaient pas.

"Je le voudrais oui, et je suppose que vous pourriez me l'enseigner de plusieurs manières. Mais laissez-moi vous poser une question à mon tour."

Il voulait lui faire comprendre à quel point les caractéristiques qu'ils avaient en commun étaient reliées par un seul et même fil, tout du moins c'était sa sensation sur le sujet.

"Avez-vous envie de savoir ce qu'il y a avant la vie?"

L'élémentaire marqua une courte pause, comme pour réfléchir quelques secondes à la façon dont il pouvait expliquer d'où il venait exactement et pourquoi il ne voulait pas simplement se démarquer en se disant extérieur à ce monde.

"Si vous venez 'd'après la mort', sachez que je viens 'd'avant la vie'. Maintenant que je connais votre date de naissance je vais vous fournir la mienne, cela me semble un partage équitable d'informations."

Il tenta de faire le compte des jours - chose délicate quand on avait pas encore totalement assimilé ce qu'étaient les mois et les années - en se souvenant des chiffres vus sur ces liasses de papier que les vivants transportaient dans la ville. Le support indiquait un certain nombre, combien de soleils étaient passés depuis?

"Je suis né le.." prononça-t-il tout en continuant à compter mentalement pour se rendre compte que son existence était bien courte et pourtant si longue comparée à celle du Lightness "Je suis né le 29 Juin..de cette année."

S'il voulait en savoir plus sur ce qu'était exactement leur lien, s'il voulait vraiment savoir à quel point ces deux extrémités qu'étaient la naissance et le décès n'étaient que de simples limites franchissables en fin de compte - et c'est ce qui poussait l'élémentaire à réviser sa position sans regrets - par plusieurs personnes et entités, il devrait lui dire. Si Jilan voulait savoir ce qu'il y avait avant la vie, il devrait lui dire ce qui se trouvait avant la mort, et ainsi, une fois toutes les cartes mises sur table, il comprendrait qu'ils étaient frères nés de deux génitrices qui n'étaient qu'une mais divisées et qui ne se parlaient plus depuis la nuit des temps, la vie et la mort.

Message par Invité Sam 27 Oct - 17:57

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Passées la stupeur et l’incompréhension, l’ombre d’un sourire flotta sur les lèvres de son interlocuteur. Finalement, la révélation du Lightness ne l’avait pas ébranlé plus que ça, pas autant que le jeune professeur l’aurait souhaité en tout cas. C’était un peu frustrant de voir son retour à la vie accepté aussi facilement mais pas de quoi se prendre la tête inutilement. Au contraire, que l’homme ne soit pas scandalisé permettait à Jilan de lui accorder un bon point non négligeable. Il aurait été ennuyé que son interlocuteur prenne ses jambes à son cou pour aller colporter la nouvelle. Si c’était arrivé, c’était la fin du chemin pour lui. Se reprendre aussi rapidement après une telle annonce n’était pas donné à tout le monde, il en avait conscience. Peut-être était-ce à cause de ce qu’était réellement Vegeo ? Un simple humain n’aurait pas accepté qu’un être revenu d’entre les morts se présente devant lui. Il aurait hurlé au mensonge ou à la sorcellerie –les mœurs des humains avaient tendance à n’évoluer que très lentement aux yeux du Lightness- sans croire un traitre mot de la vérité qui s’offrait pourtant à lui. L’élémentaire prit le temps de la réflexion. Il reporta de nouveau son regard émeraude en direction du ciel, comme s’il attendait un signe de la part du vaste océan bleu qui se profilait au-dessus de la tête des deux protagonistes. Comme un enfant guettant l’approbation de sa mère… Jilan se rappela soudain qu’il devait tirer au clair cette histoire de lien entre son interlocuteur et la Nature qui les entourait. Mais laissant de côté ce petit rappel, il leva lui aussi les yeux au ciel. La journée touchait à sa fin et, à en juger par la position de l’astre solaire, il devait être aux alentours de 17h ou 18h. Encore une heure ou deux et le soleil perdrait la chaleur bienfaisante de ses rayons. Cela marquerait la fin de cette conversation dont la tournure ne cessait de prendre des directions différentes. Tantôt amicale, tantôt dramatique. Un observateur indiscret aurait pu avoir du mal à suivre l’évolution de la discussion.

Vegeo reprit enfin la parole mais au lieu de répondre directement au jeune professeur, il se contenta de répéter la question, comme s’il débattait à voix haute. Attitude que le Lightness appréciait moyennement mais il ne fit aucune remarque là-dessus. Il avait envie de savoir ce que son interlocuteur pensait de son offre, celle de lui dévoiler ce qui se trouvait après la mort même si au fond, il pressentait que l’élémentaire serait déçu par la réponse. Car lorsqu’on présentait les choses sous cet angle, on s’attendait forcément à une réponse affirmative. Or pour Jilan, il n’y avait rien après la mort, si ce n’est qu’un vide plein de ténèbres où l’absence de sensations était l’unique chose digne de réflexions. Voulait-il une nouvelle fois déstabiliser son élève ? Certainement même si ses intentions pouvaient s’interpréter dans un but visant simplement à instruire l’individu qui lui faisait face. C’était l’un des rôles qu’il s’était attaché à remplir, en plus de celui de rétablir la loi du plus forts et d’éradiquer l’espèces humaines. Parfois, il s’amusait à constater que sa nature lunatique et violente ne collait pas avec l’image du jeune professeur, toujours prêt à enseigner son savoir à autrui. Bon d’accord dans ce genre de circonstances, ce n’était pas la première chose qui lui était venu à l’esprit quand il avait rencontré cet homme étrange. Néanmoins, si cela pouvait contenir ses pulsions un peu plus longtemps, suffisamment pour en apprendre assez sur Vegeo, alors il continuerait de jouer le rôle du gentil professeur.
C’est sans surprise qu’il entendit son interlocuteur se dire intéressé par la question en elle-même. Le pauvre. Si seulement il savait ce qui l’attendait au tournant. Comme quoi, ceux qui prétendent que la curiosité n’est qu’un vilain défaut n’étaient pas si éloignés que cela de la vérité. Il se prépara à lui fournir sa réponse quand l’élémentaire demanda l’autorisation de lui soumettre une question à son tour. Intrigué, le Lightness lui fit signe de continuer. Lui aussi finirait par se faire avoir par la curiosité…

« Avez-vous envie de savoir ce qu’il y a avant la vie ? »

Une lueur d’étonnement traversa le regard hétérochrome. Jilan ne s’attendait pas à ce genre de question en particulier. Il songeait plutôt que l’homme l’aurait interrogé sur la nature de son retour à la vie, comment, pourquoi etc … Mais visiblement, le problème en lui-même n’en semblait pas un aux yeux de Vegeo. Il n’essaya même pas de remettre en question l’état du Lightness, état qui défiait toute logique humaine. A croire que son élève était tellement avide d’apprendre qu’il en oubliait quelques principes fondamentaux ? Tout comme savoir que les poissons ne pouvaient pas vivre sur la terre ferme, un être ne pouvait pas –en théorie- ressusciter. C’était encore plus étrange que l’individu ne douta pas un instant de la crédibilité des propos de son interlocuteur. Ou alors il en savait plus sur l’occulte et l’anormal qu’il n’y paraissait. Vegeo maitrisait la magie, cela aurait dû suffire pour convaincre le Lightness et pourtant… Perdu dans ses pensées, il n’écouta que d’une oreille distraite la suite du –nouveau- monologue de l’élémentaire. Il ne retint que deux éléments essentiels selon lui. L’homme prétendait venir d’avant la vie et disait être né le 29 Juin de cette année. S’il disait bien la vérité alors cela expliquait pourquoi il n’avait pas pu empêcher l’incendie de se déclarer dans les bois. Mais qu’entendait-il par avant la vie ? Est-ce que le peuple des élémentaires naissait de cette façon ? En étant une conscience issu de la Nature elle-même avant de s’incarner dans un corps d’apparence humaine ? Peut-être que Jilan allait trop vite dans ses raisonnements, il n’avait aucune preuve tangible que ce qu’il imaginait était la réalité. Et en terme de preuve, seul Vegeo était capable de lui en fournir. Ou bien se retrouvait-il dans la même situation que lui ? A affirmer sa différence sans pouvoir l’expliquer à l’aide de détails concrets ? Dans ce cas, la conversation allait très vite se retrouver bloquée entre eux.

« Avant la vie vous dites… ? »

Le sujet en lui-même pouvait paraitre stupide. Pour le commun des mortels, rien n’existait avant la vie proprement dite puisqu’elle n’avait de sens qu’en étant une tranche infime et limitée de temps qu’on nous accordait. Vivre sans l’être semblait complètement contradictoire. Pourtant, il suffisait de prendre l’exemple le plus courant, celui des vampires pour reconnaitre que la science n’expliquait pas encore les origines et les limites de ce qu’on appelait couramment « la vie ». Les Darkness et leurs contraires, ainsi que –peut-être- les élémentaires ajoutaient leur lot d’interrogations. Malgré tout ça, l’humeur de Jilan s’assombrit dès lors qu’il aperçut l’enthousiasme de son interlocuteur. Ce dernier avait l’expression de quelqu’un tenant la réponse que des millions d’autres individus tentaient en vain d’obtenir. Mais si l’existence avant la vie était la même que celle qui nous attendait après la mort, alors la réponse laissait de marbre le Lightness. Il n’avait pas envie de découvrir l’état larvaire dans lesquelles les consciences auraient dû se trouver avant de devenir ce à quoi on les destinait. Et même si Vegeo avait eu une conscience différente avant de naitre, il n’en restait pas moins un être enfermé dans quelque chose d’autre, incapable de se mouvoir de lui-même, prisonnier de ce qu’il croyait être sa liberté. Vraiment, il n’y avait pas de quoi afficher cet air bienheureux quand on connaissait la fin –ou le début- de l’histoire. Car toute chose a une fin et l’excitation enfantine de l’élémentaire n’allait peut-être pas tarder à connaitre la sienne.

« Vous vous adressez à la mauvaise personne. Laissez-moi vous dire qu’après la mort, il n’y a rien. Seulement le vide et un silence interminable. Ayant déjà connu cette sensation, je présume qu’il en est de même pour ce qui se trouve avant la vie. A moins que… » affirma t-il froidement.

Il marqua une pause, plus pour laisser à son interlocuteur le temps d’encaisser chacun de ses mots, que pour lui-même prendre le temps de chercher au mieux les siens. La patience d’expliquer son point de vue était toujours de mise mais l’envie de se montrer compatissant avait disparu depuis un moment. Avait-elle seulement déjà existé dans le cœur de cet être ? Rien n’était moins sûr.

« A moins que vous ne soyez qu’une conscience ayant investi un corps humain dans le seul but de vous libérer de la prison qui vous contenait jadis en tant que telle. Sinon, comment auriez-vous pu affirmer exister avant même d’être né ? »

Message par Invité Dim 28 Oct - 18:19

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Dans la clairière la légère brise s'était évanouie et maintenant l’atmosphère qui régnait n'inspirait à l'élémentaire que la douceur de l'après-midi qui se terminait. L'odeur de la végétation qui les entourait commençait à s'éparpiller par-ci par-là, offrant des senteurs originales aux deux personnes présentes. Le ciel, lui, se colorait peu à peu d'orange, indiquant que le soleil enfilait de nouvelles teintes qui prévenaient les plus attentifs que la soirée viendrait les visiter dans quelques heures. Autour d'eux, le silence bienfaisant des forêts s'était imposé. Le cadre était donc plus propice à la sieste qu'au débat. Néanmoins, malgré l'ambiance relaxante omniprésente, Vegeo et Jilan semblaient rester insensibles, plongés dans une dimension où la seule chose qui comptait désormais était la vérité sans fioritures qui se cachait derrière ce qu'était la vie et son sens profond.

Les deux se jugeaient du regard. En quelques minutes seulement les révélations avaient fusé dans tous les sens. Ici l'on parlait de vie, de mort, de bien, de mal, d'existence et de non-existence. Si le débat était complexe, les réponses étaient probablement simples mais restituées de sorte à immiscer le doute dans les deux esprits. Avant la vie, après la mort, l'élémentaire s'interrogeait sur les deux extrémités en se faisant la remarque de l'importance de ce qu'il y avait au milieu. Et entourant ce tout de questions, une dominait toutes les autres: pourquoi? quel était le sens de tout cela? quelle était la raison de l'existence de ces multiples plans superposés les uns sur les autres?

En terme de curiosité, les deux côtés semblaient intrigués et une saine perplexité se faisait maitresse des idées de l'élémentaire. Sa formulation n'était pas aussi exacte qu'elle aurait dû l'être. Après tout, pensait-il, il savait ce qu'il y avait avant sa vie, il savait la forme qui était celle de la Nature, cachée aux yeux de tous, et quel était son mode de fonctionnement. Mais avant la vie des autres, avant l'existence des vivants et après celle-ci, les choses étaient-elles identiques ou différentes? il n'y avait qu'une seule façon de le savoir: attendre la réponse de Jilan.

« Vous vous adressez à la mauvaise personne. Laissez-moi vous dire qu’après la mort, il n’y a rien. Seulement le vide et un silence interminable. Ayant déjà connu cette sensation, je présume qu’il en est de même pour ce qui se trouve avant la vie. A moins que… »

Sans faire attention au ton froid de interlocuteur, il pencha légèrement la tête, intéressé par sa nouvelle révélation. Le vide. Pendant un instant ses yeux s'illuminèrent. C'était ce qui attendait les vivants seulement ou alors était-ce une règle qui s'appliquait au monde entier? non, c'était impossible. Lui avait vécu les choses de façon différente, il avait ressenti les choses de façon différente, il avait vécu avant d'exister. Enfin, des parties de lui avaient vécu.

« A moins que vous ne soyez qu’une conscience ayant investi un corps humain dans le seul but de vous libérer de la prison qui vous contenait jadis en tant que telle. Sinon, comment auriez-vous pu affirmer exister avant même d’être né ? »

Au son de ces mots, le sourire discret de l'élémentaire s'étira légèrement. Il regardait à présent Jilan d'un air enjoué. Il voyait les choses de manière si catégorique. Une conscience, une prison? il était bien loin de la vérité, il se trompait sur toute la ligne. Tout d'abord sur sa conscience, mais l'erreur de jugement était pardonnable. Avant de naître, il n'était pas une conscience, il n'était rien. Quand l'esprit et Calions se faisaient face, il n'existait pas, quand ils fusionnèrent, il n'existait pas, quand une lumière avait illuminé la forêt de son aura, sa conscience n'en était qu'aux prémices de l'existence. C'était simplement à ce moment là, genoux à terre, prostré sur lui-même, les muscles douloureux, le sang recouvrant son corps, que celle-ci avait commencé à exister. Et encore, ce qu'il avait été pendant les premières heures de sa vie n'était qu'une altération constante au niveau de la stabilité de son âme, donnant le corps tantôt à l'esprit tantôt à l'humain, les deux n'ayant pas encore totalement trouvé un équilibre qui leur permettrait de se lier pour plonger dans le néant à jamais, lui donnant naissance. Il se trompait aussi quand il affirmait qu'une prison l'avait un jour retenu contre son grès. Le plan d'existence des esprits de la Nature était au-delà de la simple considération d'emprisonnement ou de liberté.

Ses jambes le démangeaient, engourdies par l'immobilité constante lors du débat. C'est en se dirigeant vers un arbre qu'il répondit à Jilan.

"Je n'ai pas toujours été qu'une seule et unique conscience, et jamais je n'ai vécu dans une prison, même si - qui sait? - vous pourriez peut-être décrire l'endroit d'où je viens comme en étant une."

Il posa sa main contre un des arbres qui était en bordure de la clairière pour s'asseoir tranquillement, non sans s'être étiré légèrement avant. Il posa son dos contre l'écorce en poussant un soupir de soulagement. Mère-Nature n'avait pas fait preuve de clémence en le rabattant sur le sol avec autant de violence, et à de nombreuses reprises.

"Je vais vous expliquer" ajouta-t-il en levant ses yeux vers les sommets des arbres, il allait verbaliser les pensées qui s'étaient imposées chez lui depuis le début de la conversation. "Il semblerait donc - d'après ce que vous affirmez - que différentes strates composent notre monde, chacune bien distinctes et pourtant toutes liées."

Il resta silencieux pendant au moins deux secondes. Comment présenter les choses?

"Il existe une strate pour les esprits de la Nature, ceux-ci vivent dans un monde qui n'est pas accessible aux vivants - ou anciens vivants - du moins d'après ce que j'en sais." fit-il en jetant à Jilan un coup d'œil explicatif.

"Ceux-ci sont chargés de s'occuper de la Nature, sous tous ses aspects. Ils sont neutres et s'organisent autour d'un rôle de gestion uniquement, ils sont incapables de prendre position et ne vivent qu'à travers et pour leur devoir. Néanmoins, des altérations semblent possibles: sous l'influence de forces magiques extrêmement puissantes, d'un bouleversement important au niveau du champ énergétique auquel ils sont habitués, ils peuvent muter et se doter d'une conscience - même si la validité du terme est assez relative - ce leur permet d'orienter des jugements et de prendre des décisions, celles-ci étant cependant toujours et uniquement basées sur la préservation de l'environnement."

Il fit une courte pause. L'explication semblait concise.

"Ils sont capables alors de se diriger vers un second plan d'existence. Dans celui-ci se trouvent des âmes n'ayant pas de destination précise. Je dois avouer ne pas savoir grand chose sur ce niveau hormis le fait que la conscience des anciens vivants y est préservée."

Il expliquerait probablement plus tard comment il était né, autant procéder dans l'ordre et ne pas risquer de se confondre les idées.

"Nous avons ensuite une strate d'existence pour les humains vivants. C'est dans celle-ci que nous sommes en ce moment."

Il prit un instant de réflexion, pour se demander où se situait exactement la plan de Jilan, qui était composé de vide et de silence.

"Et finalement eh bien, nous avons le lieu où vous avez été pendant si longtemps, un lien où les âmes semblent patienter, totalement coupées du monde et de son espace-temps, en attente d'une renaissance sous une forme de Lightness, de Darkness où..d'autre chose."

Il porta son regard vers le vide, les yeux voilés en se rendant compte que le nombre de niveaux d'existence en était presque aberrant.

"Pour ce qui est de la fin et du début, nous avons donc deux hypothèses possibles: soit avant la vie et après la mort, pour le reste des âmes, il n'y a que le néant. Soit-il y a quelque chose d'autre que nous sommes incapables de percevoir." fit-il perdu dans ses pensées.

"Toutes ces strates, connues et inconnues, superposées et unies formeraient tout ce qui est dans ce monde et - ce ne serait pas impossible - tout ce qui a été et tout ce qui sera."

Il était temps de passer à la conclusion et d'expliquer ce que lui était.

"Pour ma part je viens de deux d'entre elles en quelque sorte. Lors des trois jours sombres un esprit naturel s'est éveillé à la conscience, il a cherché comment sauver sa forêt et s'incarner en humain. Pour ce faire il s'est exilé des bois pour chercher une âme errante avec laquelle il pourrait fusionner pour naître. Et il l'a trouvée."

Il se frotta les yeux un court instant, fatigué de raisonner autant. D'habitude il se contentait de vivre simplement, dégageant de son esprit tous les parasites que la pensée pouvait faire naitre.

"Après plusieurs mois, dans le nouveau corps, les deux esprits se sont effacés complètement pour donner naissance à une entité stable et unique."

Il bailla, lassé de ce long monologue qui s'était imposé et regarda Jilan.

"Je suis le résultat de cette union."

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