| par Invité Jeu 28 Aoû - 19:04
| La moquerie de son interlocutrice concernant son langage pour le moins grossier en sa présence, lui passa royalement au-dessus de la tête. Si le jeune professeur avait pris la peine de répondre quelque chose, il savait qu'il se serait montré désagréable envers Adélaïde. La raison ? Et bien, du peu qu'il connaissait de la principale intéressée, le Lightness doutait qu'elle soit le genre de personne à tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler. La franchise n'était pas vraiment une qualité dans la situation de la petite albinos mais Jilan devait reconnaître qu'elle lui servait parfois à aller directement au but. La changer sur ce point n'avait jamais été dans ses intentions et même s'il venait d'avoir la possibilité de remettre à sa place l'étudiante concernant sa manière de parler, le jeune professeur savait que l'éducation en était la cause. Sans elle, les personnes devenaient des êtres immoraux et stupides. A ses yeux, il lui paraissait évident que l'humaine et lui n'avaient pas été élevés de la même façon, la politesse devenait une denrée rare chez ses interlocuteurs de nos jours. L'époque jouait peut-être un facteur important, les mœurs avaient quant à elles évoluer depuis. Constatant qu'il était parti un peu trop loin dans ses divagations personnelles, Jilan haussa les épaules en sentant le regard sanglant que la jeune fille dardait sur lui, probablement en attente d'une réponse ou d'un commentaire de sa part. Était-elle déçue de voir qu'il ne prendrait pas la peine de lui rétorquer quelque chose ? Cela lui faisait une belle jambe de le savoir tiens ! Le regard hétérochrome contemplait toujours l'animal qui gesticulait misérablement au bout de sa queue, maintenue entre les doigts du Lightness. Est-ce que dans le cerveau de cette souris, l'instinct lui recommandait la fuite ? Et de combien était le pourcentage de réussite concernant sa fuite ? Les propos de la petite albinos le tirèrent de ses pensées et le même sourire habituel vint reprendre ses droits sur les lèvres de son interlocuteur.
« Je me disais justement que ce devait être terriblement ennuyeux de tester ses produits sur un animal aussi stupide... »
Se disant, il reposa la malheureuse bête dans sa cage, alors que celle-ci s'empressait d'aller se cacher dans un petit amas de sciure placé dans un coin de sa prison. La proposition de se procurer des cobayes, consentants ou non, pour tester leur virus ainsi que le vaccin qui allait de paire avec, lui plut grandement. Cela aurait le mérite d'occuper un peu ses nouvelles recrues. Enlever une personne ne passait pas inaperçu, même si l'on ciblait bien l'individu en question pour limiter les risques et la propagation de sa disparition chez ses voisins ou amis. Et comme ils semblaient être d'accord sur ce point, Jilan ne voyait rien d'autre à ajouter que la simple acceptation du projet. L'idée soulevée par son étudiante arriva pile à cet instant, lui faisant relever les yeux de la cage, à présent bien tranquille. Organiser une conférence sur le sujet ? Dans le but de rassembler suffisamment d'individus pour se procurer des cobayes de toutes les races ? C'était intéressant et sans doute plus rapide que d'établir une liste de profils adéquats.
« En effet, cela me semble être une bonne idée. A un détail près : tu n'auras pas la moindre crédibilité si tu organises toi-même cette conférence. Les humains fonctionnent encore sur un système bien stupide reposant sur cette vérité générale qui affirme que les personnes plus âgés possèdent plus de connaissances que les jeunes. Qu'importe l'étendue de tes connaissances, je doute que les journalistes et les scientifiques se déplacent pour ta seule petite langue bien pendue. »
Plutôt satisfait par la légère pique qu'il venait de glisser à l'intention de la jeune fille, le Lightness se mit alors à réfléchir de plus belle. En soi, la solution à ce problème qui n'en était pas véritablement un, s'imposait d'elle-même à son esprit. Si Adélaïde ne pouvait prétendre à ce rôle, et ce, en dépit de son enthousiasme et de ses connaissances approfondies sur le sujet, alors il ne restait plus qu'une seule personne pour assumer ce poste...
« J'organiserai cette conférence moi-même. Avec mon statut et ma réputation de professeur compétent, cela devrait suffire à convaincre le responsable de l'université de me céder une salle pour l'occasion. En revanche, il nous faudra opérer de telle sorte qu'on ne soupçonne aucun lien entre l'événement, moi et les rebelles. Pour cela, nous répandrons un gaz soporifique dans la pièce, afin d'agir en toute discrétion. Je m'occuperai de répondre aux questions des policiers par la suite. La comédie, c'est dans mon domaine. » conclut-il avec un sourire qui ne trompait personne. « Voilà qui règle le problème des cobayes je présume ? »
« Mais si tout le monde meurt excepté les rebelles, il n'y aura plus personne pour s'apercevoir que nous existons et que nous constituons une menace réelle. » objecta alors son interlocutrice.
Stupéfait qu'elle puisse lui faire part d'une interrogation pareille, le jeune professeur la dévisagea, d'abord incrédule puis il se reprit rapidement. Les arguments qu'Adélaïde avança par la suite, eurent le mérite de contenir sa mauvaise humeur naissante. Effectivement, même s'il n'avait pas prévu à la base d'épargner leurs cibles, le fait de leur offrir tout de même une chance de survie permettrait aux plus forts de s'en sortir, au détriment des plus faibles. Mais, cet ordre n'était-il pas déjà établi ? Le maillon de la chaîne était les humains pas vrai ? Alors s'ils visaient également les créatures avec ce virus, cela ne risquait-il pas de remettre en doute cet ordre naturel ? De faire de l'homme, l'élément le plus fort dans la chaîne alimentaire ? C'était absurde !
« Tu es stupide ou tu le fais exprès ? » Le ton était donné, le sien n'avait plus rien d'aimable. « L'Avventura n'est que le point de départ de mon plan. Même si sa population entière meurt, que cela soit à cause d'un mystérieux virus ou d'une guerre civile entre les différentes races, je veux que ce conflit se propage au reste de la France. Penses-tu que les conséquences de nos actes resteront sans impacts sur les autres villes alentours ? Il te faut apprendre à voir plus grand Adélaïde. Il en va de ton intérêt. »
Est-ce qu'il fallait prendre sa dernière phrase comme une menace ouverte à l'intention de l'intéressée ? Peut-être. Jilan ne s'attarda pas plus sur le sujet et planta ses iris aux couleurs différentes dans ceux, couleur sang, de son étudiante. Un silence pesant s'était installé entre eux, avant d'être rompu par le bruit des pas de la jeune fille qui retournait devant son tableau pour reprendre ses propres réflexions sur ce qui venait d'être dit entre eux. Ne s'attendant pas vraiment à ce qu'elle reprenne la parole à la suite de sa tirade, le Lightness arqua un sourcil en écoutant la question d'Adélaïde. Semer la zizanie au sein du Cercle ? N'était-ce pas le but de leur virus à la base ? Réveiller les consciences ? Rappeler que la paix n'était qu'un doux mirage pour les naïfs ? Le jeune professeur voyait son plan sous un nouvelle angle grâce aux interventions de son interlocutrice. Pour un peu, il aurait presque regretté de s'être montré aussi désagréable avec elle mais la question de la petite albinos justifiait sa propre réponse, bien que celle-ci fut particulièrement mauvaise à son égard. L'idée était tentante et plus que le virus en lui-même, si Jilan voulait pousser la population avventurienne à se plonger dans une guerre civile, il fallait détruire sa confiance placée dans la politique de ses dirigeants. Et quoi de meilleur que révéler la véritable nature de ces mêmes personnes ? Après tout, s'ils appliquaient la politique qu'ils vantaient à leurs concitoyens, alors leurs dirigeants de cette ville étaient également des créatures. Le Lightness se perdit dans ses pensées, gardant le silence pendant de longues minutes, même si la question de la jeune fille attendait une réponse de sa part. Du mouvement en direction de la cage attira de nouveau l'attention du regard hétérochrome et celui-ci se baissa pour observer la souris. Et si... ? Jilan releva alors la tête pour jeter un œil au contenu de la formule créée par son étudiante. Oui... C'était possible... Quittant l'appui du meuble, il se retourna pour lui faire face, tournant le dos au tableau et à Adélaïde au passage. Le Lightness fouilla dans la sciure pour attraper la souris qui couinait de plus belle et la plaça dans une autre boite, transparent celle-ci. Alors que le pauvre animal découvrait son nouvel environnement, le jeune professeur se saisit de plusieurs fioles, mélangeant le tout dans une autre. Parfois, la manipulation demandait un peu de minutie, alors ses gestes devenaient plus lents. Mais la concentration demeurait la même. Si son interlocutrice s'était rapprochée de lui à cet instant, jamais Jilan n'en aurait pris connaissance, trop absorbé par son expérience. A présent que l'idée venait de germer dans son esprit, il voulait en vérifier la véracité. Et si cela échouait alors... Il s'en remettrait à son cerveau et aux idées d'Adélaïde. Une fois qu'il eut terminé de mélanger les différents composants qui se trouvaient à sa disposition, il versa une infime partie du contenue sur la souris. Reposant la fiole, il ne lui restait plus qu'à attendre. Le comportement de l'animal ne changea pas lors des premières secondes puis devint de plus en plus violent, à mesure que le produit agissait sur elle. La souris vint même se jeter contre les parois de sa prison, cherchant à atteindre et mordre le bipède qu'elle apercevait dans son champs de vision restreint par sa petite taille.
« J'ai déjà ma petite idée là-dessus... Exploiter la sauvagerie de ceux qui prônent la paix... Après cela, les habitants de l'Avventura ne pourront plus croire en eux et en leurs idéaux...plongeant la ville dans une parfaite guerre civile... »
Dès lors qu'il se tut, seuls les bruits furieux et sauvages de la souris résonnaient dans le laboratoire. Le pelage de la pauvre bête se colorait progressivement en rouge, à force de se jeter à de multiples reprises contre les parois de sa prison. Les blessures s'aggravaient de plus en plus, peut-être même qu'elle finirait par mourir d'un choc crânien trop important ? Le jeune professeur ne se préoccupait déjà plus du sort de l'animal. |
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