| par Invité Mar 30 Juin - 22:18
| Rapidement remise de sa surprise de se voir confrontée à un adversaire aussi impressionnant qu’improbable dans cette partie de la forêt, la louve ne bougeait plus. Son regard doré était rivé sur le nouvel arrivant, comme pour évaluer leurs forces respectives et même ses yeux étaient immobiles. Un ours n’était pas à prendre à la légère, contrairement à l’humain, lequel avait déjà perdu le combat malgré un peu de résistance futile de sa part. La puissance de l’animal brun égalait sans peine la sienne, ce serait donc un combat des plus intéressants et toujours à mort. La Bête ignora l’échange entre les deux alliés improvisés. Peu lui importait leur relation au final, seul comptait sa nouvelle cible. Un grognement mêlant excitation et satisfaction s’échappa de ses babines retroussées en un rictus déplaisant. Elle allait songer à se rapprocher en petits cercles autour de l’ours mais celui-ci choisit la charge directe, frontale. Typique des animaux de son acabit. Tout dans la force et rien dans la cervelle. Le premier réflexe de la louve fut d’éviter l’attaque par un bond en retrait puis un autre sur le côté. Elle évaluait toujours la situation, plus concentrée cette fois. Elle vit venir l’énorme patte griffue dans sa direction et l’évita de justesse en plongeant en avant pour venir mordre l’une des pattes arrière de son adversaire, lequel grogna de douleur. Sauf que cet angle d’attaque laissait son flanc gauche vulnérable et alors qu’elle retirait déjà ses crocs de la masse poilue qu’offrait la patte de l’animal, l’ours riposta. Elle vola, littéralement, sur plusieurs mètres, heurtant un arbre de plein fouet. Le craquement sinistre se répéta dans les environs alors que l’écorce cédait sous le poids de la louve. Le choc la sonna et elle grogna à l’intention de son adversaire. Il allait lui payer ce coup ! La Bête sentit l’odeur de l’animal se rapprocher rapidement dans sa direction. Cet idiot chargeait de nouveau. Cette fois, elle vint directement à sa hauteur mais plutôt que de chercher l’affrontement frontal comme l’ours en avait l’intention, elle sauta sur un arbre et rebondit dessus pour atterrir sur la montagne de muscles. Surpris par la vitesse de la louve, l’animal pilla net et ce fut suffisamment pour que l’intéressé lui morde violemment la nuque, faisant rapidement couler une cascade venant rougir les poils déjà humides de son adversaire. Le goût et l’odeur du sang la rendait folle. Elle en voulait toujours plus ! L’ours grogna de plus belle, tournant d’abord sur lui-même pour tenter de se débarrasser de l’intruse avant de finalement se dresser sur ses pattes arrière. Ce qui eut le mérite de faire réagir la louve, laquelle planta ses griffes dans les épaules de son adversaire, essayant tant bien que de mal de maintenir sa prise, armée en cela de sa mâchoire et de ses griffes. Ses seules armes de chasse. Et de mort.
Peu à peu, elle sentit la fatigue envahir le corps de l’animal, réduisant ses efforts, sa vitesse et sa ténacité à poursuivre le combat. Mais la fatigue se faisait aussi ressentir dans les membres de la Bête. Ils tremblaient sous l’effort d’être constamment tendus. Une chance que son adversaire soit le premier à rendre les armes. L’ours se laissa retomber sur ses quatre pattes, soufflant et grognant. Cependant, il n’était pas encore vaincu pour autant. Tous les deux le savaient. Si la Bête ne pouvait pas attendre sa gorge pour la lui déchirer avec ses crocs, alors toute morsure supplémentaire ne suffirait qu’à affaiblir l’animal, non le tuer. Restait à trouver comment passer dessous sans éveiller de nouveau l’instinct combatif de son adversaire… La louve enfouit sa truffe dans l’épaisse fourrure de l’animal en dessous d’elle et ce contact soyeux, quoique parfois irritant, tant à cause de l’orientation des poils que de l’odeur, réveilla un souvenir en elle. Elle connaissait cette sensation de poils emmêlés. Petite, elle l’avait déjà expérimenté avec le chien d’un couple d’amis, curieusement pas effrayé par l’aura bestiale qu’elle avait toujours dégagée, depuis le plus jeune âge. Raison pour laquelle ses parents n’avaient jamais accepté d’adopter un animal de compagnie et ce malgré les protestations ou caprices de leur fille unique. Elle se rappela soudain ce Golden Retriever au pelage crème qui venait jusqu’à lui lécher le visage, en remuant la queue. L’odeur était différente parce que l’ours et le chien ne provenaient pas du même univers mais la sensation était là. Avant que la Bête ne le réalise, la conscience humaine refaisait surface et une jeune femme brune gisait nue sur l’ours, lui-même brun. Etrange tableau. Réalisant ce qui se passait et où elle se trouvait. Calypso sauta du dos de son ancien adversaire, lequel parut aussi déstabilisé qu’elle de faire face à une humaine tout d’un coup. La jeune femme inspira un grand coup et leva les bras, hurlant pour faire peur à l’animal qui ne demanda pas son reste. Visiblement, la transformation en sens inverse l’avait profondément affolé. La représentante se tourna alors vers l’humain, prête à s’excuser. Dans ce sens, elle ouvrit la bouche, même si l’autre aurait certainement du croire à ses futures paroles… Sauf qu’elle ne put accepter de rester nu devant l’inconnu, aussi se rapprocha-t-elle rapidement de lui. Quelques foulées suffirent pour lui envoyer son pied dans la figure, l’assommant net. Un soupir de soulagement s’échappa de ses lèvres et elle entendit le bref jappement. Baissant les yeux, Calypso aperçut le jeune chien. Son premier réflexe fut de s’accroupir en lui souriant.
« Merci d’avoir défendu ton maître… »
Malgré son irrésistible envie d’aller caresser la tête pour le reste du corps de l’animal, celui-ci était trop méfiant – et à juste titre – envers elle. La représentante soupira faiblement et se redressa, conservant tout de même son sourire. Pâle et discret. Tout comme l’aube. Ce n’était certainement pas prudent de laisser cet homme seul et sans autre défense que son fidèle ami à ses côtés. Inconscient de surcroît. La jeune femme lança un regard noir au chien quand celui-ci aboya après elle au moment de soulever l’inconnu mais elle ne se démonta pas pour autant. Au lieu de ça, elle leva les yeux et aperçut la grotte. Excellent choix pour y déposer l’homme. A l’intérieur, il aurait tout le temps de reprendre ses esprits, au sec. Et si par malheur il venait à reprendre connaissance avant qu’elle ne soit partie, la pénombre du renfoncement rocheux la dissimulerait à ses yeux.
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